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Liberté ...

   
 

 

 

 


 
Le Québécois
chante la lutte des Peuples
contre la Prédation
 
 

Horizon...


Du conseil international en gestion stratégique et en développement d'économies émergentes...
Au regard sur la régression du respect de la dignité humaine, des libertés et du partage.
Une espérance solidaire avec ceux qui ne l'acceptent pas.
A contre-courant...

 

 

 

Modération


Tous commentaires et propos contribuant à enrichir échanges et débats, même contradictoires, sont amicalement reçus. Ne sont pas acceptées les pollutions organisées, en particulier :

a)  Hors sujets et trolls

b)  Attentatoires à la Dignité Humaine :

.  Injures

.  Propos racistes

.  Incitations à la haine religieuse

 

Avertissement

Liberté d’expression et abus de procédure

 

Devant la multiplication actuelle des atteintes à la liberté d’expression, sous forme d’intimidations et de menaces à l’égard de blogs et de sites, de la part d’officines spécialisées dans la désinformation et la propagande relatives aux évènements passés, présents et à venir au Moyen-Orient, tout particulièrement, il est rappelé que la Loi du 21 juin 2004 (LCEN),

modifiée par la Loi n°2009-1311 du 28 octobre – art.12, s’appliquant à des « abus » éventuels,

spécifie

dans son alinéa 4 :

« Le fait, pour toute personne, de présenter aux personnes mentionnées au 2

un contenu ou une activité

comme étant illicite

dans le but d'en obtenir le retrait ou d'en faire cesser la diffusion,

alors qu'elle sait cette information inexacte,

est puni

d'une peine d'un an d'emprisonnement

et

de 15 000 Euros d'amende»

 

 

28 janvier 2011 5 28 /01 /janvier /2011 21:13

 

 

« Ils ont les montres, nous avons le Temps. »

Devise de la Résistance Afghane

 

 

 

 

 

L’Inquisition au XXI° siècle

 

« Il fallait bien empêcher les barbus d’arriver au pouvoir. La “realpoltik”, que voulez-vous… » 

 

Je regardais François Baroin à la TV, ministre du Budget et porte-parole du gouvernement français. Déversant, à propos de la Tunisie et des Droits de l’Homme, sa brouette de clichés comme autant de galets polis par l’usure du temps, justifiant le soutien inconditionnel de la France, et des pays occidentaux, à ce qui était une des dictatures parmi les plus féroces et corrompues de la planète.

“Homme politique” de l’année paraît-il, dans je ne sais plus quel magazine “pipole” ou “pipelette”. Bernadette Chirac, présente à l’émission, lui voit même un destin de président de la république. Oui, bien sous tous rapports, très représentatif de la caste au pouvoir. Parfaitement à l’aise, sous couvert du réalisme politique, admettant l’ignoble, l’abjection : l’arbitraire, la torture, la négation de la dignité humaine…

 

Pathétique contraste entre cet homme bien repassé, brushing savamment architecturé, propre sur lui, style Harry Potter, pour reprendre les termes de l’animateur de cette émission de divertissement, et la photo d’une des victimes de la dictature que j’avais sous les yeux, Adem Boukadida, sortant du terrible centre de tortures de Mornghouia, dans la banlieue de Tunis. (1)

 

Hébété, tétanisé encore, par l’horreur vécue. Marchant, respirant difficilement. Il a eu les jambes brisées, le sternum défoncé, les mains écrasées, entre autres violences et tortures subies. Il ne peut plus écrire. Il a 30 ans.

 

Il vivait avec une distribution de pain, 2 fois par jour dans une cellule où étaient entassées 60 personnes. Comme toilettes : un trou au milieu du local. Du fait de ses jambes brisées, il ne pouvait pas s’accroupir et demandait, en vain, qu’on soigne ses blessures et qu’on lui accorde des toilettes décentes.

 

Le sadisme, l’humiliation, dans leur rayonnement mortifère.

 

Bouazizi-Tombstone-Tunisia-Jan-2011.jpg

Hommage à Mohamed Bouazizi

 

Son crime ?...

 

Il avait fait des études à l’université d’Al-Azhar au Caire. Un homme tranquille, croyant et pratiquant, ne militant dans aucun parti, ni mouvement. N’ayant pas trouvé d’emploi malgré ses diplômes, il tenait une modeste boutique de tissus. Partageant son temps entre sa famille, son commerce et la mosquée pour y prier. Pour le régime, c’était un  faisceau de preuves suffisant pour cataloguer Adem Boukadida comme “terroriste islamiste”. Si ce n’était de fait, dans tous les cas : en puissance.

 

Il faut “faire du chiffre” et montrer aux occidentaux qu’on est superactif, hyperactif, proactif, dans “la chasse aux barbus”, pour justifier son label de « rempart démocratique contre l’islamisme ». Ouvrant le boulevard aux adulations des nomenklaturas de l’Empire et de ses vassaux, pour service rendu à la Civilisation. Et, en retour, un soutien inconditionnel à tous les agissements tyranniques.

 

Arrêté au mois de novembre dernier, le jour même de la grande fête religieuse musulmane de l’Aïd el Kébir, Il a donc subi la torture pour lui faire avouer ses crimes. Non seulement on lui cassait les os mais, pour le relaxer probablement, il avait droit à de longues séances de « waterboarding », ou supplice de la baignoire comme l’appelaient hygiéniquement les spécialistes es-tortures de la Gestapo, reprenant un grand classique de l’Inquisition.

 

Comme il n’en avait pas commis, qu’il n’y avait aucun commencement de preuve, ses tortionnaires s’acharnaient à lui faire reconnaître qu’il en avait “l’intention”. Jusqu’à lui briser les mains, se saisir de son pouce de force, pour lui faire signer un acte d’aveux qu’il n’a jamais prononcés.

 

Car le “crime d’intention” est la norme de tout régime de terreur, et donc de la soi-disant lutte anti-islamiste imposée par les occidentaux dans les pays musulmans. Le “délit de piété” étant assimilé, au nom de la laïcité démocratisante, à “l’intention terroriste”, à la tentative de subversion. Pire ! Au “blasphème” à l’égard de l’Occident, et de ses fondés de pouvoir : les dictatures imposées.

 

Justifiant, ainsi, la bénédiction de tous les arbitraires. Le vocable d’islamiste servant de fourre-tout dans lequel sont jetés tous opposants, ou suspects d’opposition. Car, si vous êtes un opposant à une dictature installée par l’Occident dans un pays musulman vous ne pouvez être qu’un islamiste. Et un islamiste, dans une logique imparable, ne peut être qu’un terroriste.

 

L’équivalent de la chasse aux hérétiques, ou aux sorcières, de l’Inquisition. Paradoxe, au XXI° siècle : si vous êtes “pieux”, vous êtes un “hérétique” par rapport aux canons de la modernité. Nous voilà revenus au Moyen-Age, dans la chasse paranoïaque à l’Hérésie ! La Grande Régression, ce naufrage de la Civilisation des Lumières si bien analysé, décortiqué, par Jacques Généreux dans son livre sur cette pathologie. (2)

 

Jusqu’aux derniers jours, raconte Adem Boukadida, malgré bruits des fusillades et odeurs de lacrymogène franchissant l’enceinte de ce centre de torture, pour bien faire comprendre que les dictateurs passent mais que les tortionnaires restent, tous les “terroristes”, en herbe ou en barbe, étaient réunis dans la cour, dans un rituel quotidien, pour être battus à coups de matraques et de nerfs de bœuf.

 

L’Inquisition, dans l’arrogance de son impunité.

 

 

Barbe à longueur de poil variable  

 

A ce jour, beaucoup des victimes de l’arbitraire et du sadisme, en Tunisie, n’ont pas encore été libérées de ces goulags. Et, sont loin d’en sortir. Les hommes du régime, qui savaient, qui ont cautionné, soutenu ces horreurs, ces crimes contre l’humanité, ne veulent pas que cela se diffuse trop. Les protecteurs occidentaux du régime, prescripteurs et complices de ces crimes, n’y tiennent pas non plus. (3)

 

Ces innocents seront relâchés au compte-gouttes, en catimini. Comme 90 % des détenus de Guantanamo, et autres centres de tortures de l’Empire et de la Coalition, sauvagement torturés pour être finalement relâchés faute de preuves. Souvent restitués à leurs pays d’origine et sommés de se taire. S’ils ne meurent pas avant, sous la torture ou dans une exécution sommaire. Pas de vagues !...

 

Certains meurent après leur libération. Réduits à l’état de loque humaine. Comme Zouheir Yahaoui, autre héros de la Révolution Tunisienne, jeune créateur du site Tunezine où il brocardait le régime et son gouvernement de malfrats. Arrêté, placé en centre de tortures pendant plus d’un an, il n’a pu survivre aux traitements subis.

 

Adem Boukadida a eu de la chance dans son malheur, grâce à un avocat, des soutiens, tenaces et courageux. Souhaitons lui, ainsi qu’à ses frères d’infortune, de trouver rapidement la santé et la joie de vivre…

 

En fait, les gouvernements occidentaux, à commencer par celui de la France, ne se sentent nullement gênés. Ils mentent avec autant d’assurance maintenant, quant à leur “soutien au valeureux peuple Tunisien”, que lors de leurs éclatantes démonstrations d’amitié à l’égard du dictateur en place…

 

Leur argumentaire sur l’impérieuse nécessité d’organiser en permanence “la chasse aux barbus” censés s’en prendre aux libertés, et à La Femme, même usé jusqu’à la corde, aussi grotesque soit-il, est et sera martelé en permanence. Ayant de la conception de la barbe une appréciation de la géométrie et de la dimension du poil aussi variable que pour la Justice, les Droits de l’Homme, ou les Conventions de Genève sur la protection des populations civiles.

 

La femme musulmane ? La protection des libertés ? Une société civile laïque ? De tout cela : ils s’en contrefichent. La preuve ?

 

La femme musulmane ?...

 

Avant de prétendre libérer La Femme, quel que soit son pays, on commence par ne pas le bombarder, l’occuper militairement, le piller, y installer des centres de tortures, créer des milices de “collabos”, entretenir la terreur. On s’assure que La Femme qui y vit ne soit pas massacrée, affamée, humiliée, avec ses enfants, sans médicaments pour les soigner, ni écoles pour les éduquer, sa maison détruite.

 

Les abominations et atrocités à l’encontre des populations commises en permanence par les forces d’occupation occidentales, en Palestine, en Irak, ou en Afghanistan, n’embarrassent pas une demi-seconde ces “féministes” folkloriques. Chez ces gens-là, Gaza et son blocus inhumain : on ne connait pas.

 

La protection des libertés, à commencer par celle du droit de vote ?...

 

L’Empire et ses vassaux soutiennent toutes les dictatures qui leur conviennent, dans un simulacre d’élections, la France en premier. Même les dictatures qui se succèdent de père en fils, comme au Togo ou au Gabon, récemment. Comme il était prévu en Egypte, où le fils Moubarak devait prendre le relais du père.

 

Ben Ali était un dictateur à vie, derrière une parodie de consultation électorale dont il ressortait vainqueur, à chaque fois, avec plus de 90 % des votes. Tout le monde le savait, mais faisait semblant de ne pas le savoir. Et, c’était un des rejetons de la famille qui était programmé comme héritier du pouvoir. Parmi les schémas de succession à l’étude figurait celui de son épouse comme présidente…

 

La défense d’une société civile laïque ?...

 

Comment ne pas rire devant cette cynique affirmation ? Quand on voit la déférence des gouvernements occidentaux, leur soutien inconditionnel, à l’égard d’un régime théocratique, corrompu, rétrograde, méprisé par l’ensemble de la communauté musulmane, sunnite ou chiite : L’Arabie Saoudite.

 

Détesté même par son propre peuple. Nos médias n’en parlent pas, mais il existe un peuple en Arabie Saoudite qui subit ce clan mafieux. Il ne peut jamais s’exprimer sur la gestion de son pays et de ses ressources, car les bureaux de vote y sont inconnus. Comme dans toutes les “pétromonarchies” du Golfe, considérées comme des propriétés familiales gérées par l’Empire.

 

Régime fondé sur une secte aussi hypocrite que déjantée : le Wahhabisme. Soutenu par Roosevelt dans les fameux accords signés avec le clan Saoud, sur le croiseur USS Quincy le 14 février 1945… Livrant la région et ses immenses ressources à l’Empire.

 

Secte allant jusqu’à interdire aux femmes de conduire un véhicule. Seul pays au monde. Il est vrai que cela alimente les fourneaux de la propagande islamophobe faisant croire que toute femme est interdite de conduire un véhicule dans les pays musulmans... (4) Défigurant, actuellement, dans un urbanisme sauvage les villes de pèlerinage de la Mecque et de Médine, détruisant quartiers, bâtiments, vestiges historiques, inestimables patrimoines de l’Humanité, pour y construire tours et gratte-ciel surplombant les lieux saints, dans un délire d’inculture et de spéculation indécente d’avidité.

 

Où se trouve la défense de la laïcité dans l’instauration par l’Occident, depuis les accords Sykes-Picot de 1917, de l’apartheid religieux en Palestine ? Où la spoliation de la terre de vos ancêtres a pour fondement l’appartenance religieuse, certains fanatiques de cette théocratie coloniale ayant pour projet d’assimiler la religion à une race... (5)

 

Que dire de la mosaïque religieuse imposée de force au Liban par les puissances occidentales, depuis le 19 ° siècle, où la représentation politique au parlement et la répartition des responsabilités gouvernementales ont pour fondement l’appartenance religieuse ?

 

En fait, loin de les pourchasser, les gouvernements occidentaux adorent les “barbus”. Aucun problème s’ils s’en mettent un maximum dans les poches pour eux et leurs familles. A deux conditions : laisser piller leur pays et souscrire à toutes les volontés de l’Occident au Moyen-Orient. Ceux qui ne l’acceptent pas seront diabolisés et traités en terroristes !

 

Prétendre soutenir une dictature au motif qu’elle représenterait un « rempart contre l’islamisme » est, en conséquence, une “faribole”. Symptôme fondamental dans la compréhension de la situation : l’Empire est nu. Confirmant ce que tout le monde sait, en  imposant le tout et son contraire dans le cynisme, il n’applique non pas des Valeurs, mais La Loi du Plus Fort.

 

Au-delà des mensonges de la propagande occidentale, l’écroulement de la dictature en Tunisie présente une dimension géopolitique qui est occultée par la plupart des analystes. Ce n’est pas simplement une revendication sociale, se doublant d’un appel à l’octroi des libertés publiques élémentaires, qui vient de surgir. C’est un système politique, économique, et géostratégique, imposé par l’Occident qui vient d’imploser.

 

Conséquence d’une idéologie générant un système de prédation néocoloniale longuement mûri, peaufiné, structuré, au fil des décennies, depuis la chute de l’empire Ottoman et les accords de Sèvres de 1922 répartissant ses dépouilles entre puissances occidentales. Bientôt, un siècle. Les immenses richesses de cette région, que les anglo-saxons désignent par MENA (Middle East – North Africa), étant pillées avec la complicité d’autocraties soigneusement sélectionnées et contrôlées.

 

Idéologie renforcée et théorisée depuis la chute du Mur de Berlin, en direction des opinions publiques occidentales analphabètes de désinformation et anesthésiées de propagande sur cette aire géographique. Avec le célèbre “Choc des Civilisations” sorti en 1996 : l’islamiste remplaçant le communiste dans l’argumentaire impérial. Du MENA, la prédation-oppression sera systématisée à l’ensemble des pays musulmans suivant les mêmes concepts et méthodes : Pakistan – Indonésie, évidemment, mais aussi pays musulmans d’Asie centrale, minorités musulmanes en Inde, aux Philippines et en Thaïlande.

 

Grattons le vernis académique de la thèse du Choc des Civilisations et nous trouvons, tout simplement, une idéologie parmi les plus sanguinaires que notre imaginaire d’Homo Politicus ait pu inventer et appliquer sur cette planète. Avec ses trois broyeurs :

 

=> Prédation coloniale, avec trois axes majeurs : ressources naturelles spoliées ou bradées, marchés locaux rendus captifs pour l’importation des produits et services de l’Empire, privatisation des services publics gérés comme des rentes de situation pour les groupes occidentaux.

 

=> Barrage de l’accès aux hautes technologies : les pays musulmans en sont bannis pour maintenir un « gap » technologique avec l’Occident. Seul est toléré un minimum de connaissances techniques permettant d’assurer le fonctionnement des activités de sous-traitance confiées par l’Empire.

Expliquant l’absence d’instituts de recherche de haut niveau dans ces pays. Donnant le pourquoi de la traque aux chercheurs de ceux qui avaient réussi à former un pôle de recherches scientifiques, devenus les cibles privilégiés de ses escadrons de la mort. Rien qu’en Irak : plus de 350 spécialistes de haut niveau, dans toutes les disciplines (y compris en informatique ou neurochirurgie…), ont été assassinés suite à l’invasion et la destruction du pays.

 

=> Racisme d’Etat : décliné, articulé, sur une propagande islamophobe  de haute intensité pour justifier auprès des opinons publiques internationales, occidentales et non musulmanes, l’hyperviolence et le pillage de l’Empire dans les pays musulmans. En entretenant, en permanence, un esprit des Croisades…

 

Le peuple Tunisien vient, toutefois, de perturber la marche de ce rouleau compresseur…

 

Tunisia-Heart-od-Revolution-jan-2011-AJ.jpg

 

 

Le commencement de la fin ?

 

L’idéologie du Choc des Civilisations est en “échec”, en Tunisie. Peut-être, mais elle est loin d’être “mat”…

 

La Bande des Quatre (France, Israël, Italie, USA) qui administre ce condominium qu’est la Tunisie pour l’Empire, chacun dans son domaine de compétences et d’intérêts, s’active pour enrayer le mouvement. Il n’y aura pas d’effet domino.

 

Gardant les mêmes piliers et seconds couteaux de Ben Ali, ils vont lâcher un peu de lest sur le social et la liberté d’expression. Cela ne dérange pas l’Occident. Pour reprendre la métaphore de Reinaldo Arenas : dans tous les pays, le Peuple est mené à coups de pied au derrière par l'oligarchie qui le "gouverne"; la différence entre une dictature et une démocratie, c’est que dans la première, il doit « la fermer », et dans la seconde on le laisse « gueuler ».

 

Appliquer la tactique de l’édredon : laisser la colère s’apaiser, les manifestations s’essouffler, sans trop de casse. En canalisant le discours par les médias de la propagande. En  isolant les plus obstinés, pour les museler ensuite. En emballant le tout dans “du pain et des jeux”, suivant la recette mise au point dans l’Antiquité, par les Romains. Sur fond de simulacre électoral à venir…

 

En Europe, en France, des millions de gens sont descendus dans la rue pendant des semaines pour manifester leur colère devant l’injustice économique et sociale. Les lois et décisions des nomenklaturas, contre lesquelles ils protestaient, ont toutes été votées et sont appliquées.

 

La ploutocratie se fiche éperdument de la volonté populaire. Elle détient la force et l’appareil de propagande. Les propos aussi imbéciles que cyniques d’une Alliot-Marie, ex-ministre de l’Intérieur de la France, sur l’expertise des forces de répression sont l’illustration de ce complet mépris.

 

Le seul point qui gêne les occidentaux dans ces mouvements de révolte populaire, notamment en Egypte et Jordanie, c’est qu’ils arrivent à un mauvais moment, avec un mauvais exemple.

 

Le mauvais exemple : c’est celui de l’armée Tunisienne. Refusant de se comporter en milice au service d’une caste au pouvoir, de tirer sur le peuple. Se comportant en armée au service de la nation, de sa souveraineté, de la protection du peuple et de ses institutions. Si toutes les armées des pays musulmans se mettent à éprouver des états d’âme et respecter des principes, où va-t-on ? La situation risque de devenir intenable. Là, réside le véritable danger pour les intérêts de l’Empire.

 

Le mauvais moment : à l’instant même où tous les gouvernements occidentaux préparent activement une  nouvelle guerre au Moyen-Orient. Objectif : invasion du Liban, destruction de la Syrie, écrasement de l’Iran. Les conclusions en préparation, évidemment truquées, du Tribunal Spécial du Liban enquêtant sur l’assassinat de l’ex-premier ministre Hariri, devant servir de prétexte. Cette pantalonnade ayant pour finalité l’obtention de l’autorisation de l’ONU pour justifier la guerre.

 

Si l’armée rejoint le peuple comme en Tunisie, une guerre au Moyen-Orient aura pour effet secondaire un balayage immédiat de toutes les dictatures patiemment mises en place par l’Occident. Cela donne à réfléchir. C’est pour cela qu’en Egypte, ils ne vont pas faiblir et faire tirer sur la foule. Quitte à employer des snipers mercenaires étrangers. L’Irak en est bourré…

 

Il y a eu déjà des précédents surprenants de fraternisation entre l’armée et le peuple au Moyen-Orient. Au cours de ces évènements, j’ai pensé à l’écroulement de la dictature qui, si elle n'opprimait pas un pays arabe, présentait des similitudes avec celle qui étouffait la Tunisie : celle du Shah d’Iran.

 

Il avait constitué une des premières armées du monde, ne cessant de s’en vanter, par des achats d’armements massifs. Les pétroliers, à qui il bradait les ressources du pays, et l’ensemble du monde occidental le soutenaient. Prêt en en faire une puissance nucléaire (cf. les faramineux contrats Eurodif avec la France qui devait livrer 10% de son uranium enrichi). Une des polices secrètes parmi les plus sadiques et les plus ignobles qu’un peuple ait pu subir : la SAVAK.

 

Son régime s’est écroulé par la révolte populaire, l’armée refusant de tirer sur le peuple.  Mais, ayant tellement décapité les élites au nom de la "lutte anticommuniste" (à l’époque l’épouvantail, pour justifier la répression des peuples, n’était pas "l’islamisme" mais le "communisme") ce sont les cadres religieux survivants qui ont encadré le mouvement.

 

Le contexte Tunisien est différent de celui de la chute du Shah, sociologiquement et politiquement, mais on retrouve dans les deux cas les mécanismes sanguinaires et prédateurs de ce type de régime policier :

 

 

i) La sauvagerie exponentielle de la répression

 

Derrière un décor de stations balnéaires et de circuits touristiques, la répression était perceptible. Circulaient des informations précises et recoupées, malgré la censure en Tunisie et dans les médias internationaux, sur ce qui se passait notamment dans la région de Gafsa, Gabès, en révolte depuis plus de deux ans, et dans d’autres parties isolées du pays.  

 

Les villes étant moins touchées par cette barbarie où, par exemple, des milices cagoulées se livraient à des viols collectifs hommes et femmes, et autres violences, devant les familles, y compris devant les enfants.

 

 

ii) La féroce persécution de l’Islam

 

Sous la pression des occidentaux, le Shah d’Iran encouragea la persécution de l’Islam. C’est sous son régime que furent organisées, dans un pays musulman, les premières campagnes antimusulmanes au nom de la laïcité. Symboliquement dans un accès mégalomaniaque il s’était même fait couronner à Persépolis, “Empereur successeur de Darius”, pour célébrer l’effacement de l’Islam en Perse…

 

La Tunisie était considérée comme un champ de bataille essentiel dans cette stratégie, et citée en exemple comme modèle. En fait, sous couvert de “laïcité” et de lutte contre “l’islamisme”, avec des services encadrés par des  “spécialistes étrangers”  véhiculant l'idéologie du “Choc des Civilisations”, ce n’était que travail de basse police : fichage des fidèles fréquentant régulièrement les mosquées, pratiquant le Ramadan, portant des tenues “traditionnelles”, etc. Jusqu’à profaner, avant de la fermer, la mosquée de l’université de Tunis, jonchée de bouteilles d’alcool et d’excréments. C’est dans cet état qu’elle a été trouvée, lors de sa récente réouverture…

 

Evidemment, dans les pays où les responsables politiques sont des musulmans pratiquants ce seront des méthodes plus “soft” qui seront appliquées. Une des plus pourvues en moyen financiers est l’envoi d’évangélistes avec une couverture d’ONG. Proposant, tout spécialement auprès de la jeunesse, visas, bourses et autres incitations pour provoquer des « conversions ».

 

 

iii)  L’acculturation d’un Peuple

 

L’inconscient collectif d’un peuple à coloniser est une des cibles prioritaires d’un Empire. Livres scolaires, littérature, produits de divertissement, jeux vidéo, documentaires, films. Tout ce qui peut formater un imaginaire et conditionner un esprit critique. Un peuple a de multiples racines. Le travail de propagande consiste à les arracher progressivement, méthodiquement.

 

Si pour le Shah d’Iran l’Histoire s’arrêtait à Darius, dans les pétromonarchies elle commence avec les chaînes US consacrées au sport. Les enfants du Koweït ou des Emirats connaissent par cœur le nom des joueurs de base-ball du championnat américain, mais rien sur l’histoire de la région dans laquelle ils sont nés. En Egypte, l’Historie s’arrête aux pharaons. C’est le fond de commerce du tourisme local, mais aussi de ce qu’on veut imprimer dans l’inconscient collectif.

 

Je force le trait, bien sûr. Mais, à peine.

 

En Tunisie, le régime allait très loin, sous la pression occidentale. Jusqu’à éradiquer ses racines “arabes”. Les exemples sont multiples. Sur des sites ou brochures touristiques était mentionné que la Tunisie n’était pas un peuple « arabe ». Pour ne pas effrayer le touriste, invoquait-on comme prétexte…

 

Se dire ou se croire « arabe », et donc solidaire des autres peuples arabes (manière ou "ardente obligation" d’oublier la Palestine...), devenait plus que suspect. Arracher ainsi une des composantes d’un peuple ne peut provoquer que résistance et rejet.

 

 

iv)  Le pillage occidental 

 

Toutes les principales industries, le système financier, les meilleures terres agricoles, les meilleurs terrains constructibles, et services publics, sont contrôlés par des intérêts étrangers (avec ou sans hommes de paille). Jusqu’à la production de yaourts qui doit payer des royalties par pot distribué et consommé.

 

Tout est fait, planifié, pour qu’il n’y ait aucun transfert de technologie en faveur du pays, pour le maintenir dans la dépendance. Contrairement, par exemple, à Taïwan ou la Corée du sud qui ont bénéficié de l’appui massif des occidentaux. Ou le Vietnam, en ce moment. La Tunisie, comme tous les pays musulmans coopératifs, ne sera considérée, au maximum, que comme un gentil et compréhensif sous-traitant.

 

Ne générer que des emplois sous-payés et sous-qualifiés (tare de l’hôtellerie, de l’industrie touristique en général, et de la sous-traitance), n’est pas l’avenir d’un pays. Les activités des secteurs du tourisme et de la sous-traitance sont extrêmement volatils. Les contrats pouvant disparaître massivement d’une année sur l’autre. Les “intermédiaires” jouant la concurrence internationale.

 

Sans compter les effets secondaires ravageurs qu’exerce une industrie du tourisme dans une économie insuffisamment diversifiée et prospère sur des populations locales appauvries, vivant dans une totale précarité : prostitution, alcoolisme, drogues.

 

Nous retrouvons, là encore, la stricte application de la stratégie du "Choc des Civilisations".

 

Même en fuite le dictateur se révèle d’une grande utilité, servant de bouc émissaire pour exonérer les occidentaux de toute responsabilité économique. Signe évident : si Ben Ali et sa famille détenaient 50% de toutes les affaires en Tunisie, comme on peut le lire dans des médias, qu’attend-on pour nationaliser ces participations en les domiciliant dans un fonds public ?...

 

Cela ne se fera pas.

 

Car ces boucs émissaires, aussi crapuleux soient-ils, étaient aussi des “porteurs” d’actions pour le compte de personnalités étrangères. Souvent dans le cadre d’arrangements mafieux : 1/3 pour toi, 2/3 pour nous… C’est pour cela qu’il a été soigneusement « exfiltré » avec ses proches. Les bénéficiaires de ces arrangements ne voudront jamais se voir spoliés dans une nationalisation brutale des biens du tyran. Il va falloir au préalable trouver les montages financiers adéquats, pour rendre à César ce qui est à Jules…

 

L’Empire a été secoué, il va résister. Il reste encore au Peuple de la Tunisie un long chemin à parcourir pour parvenir à l’indépendance économique. Qui est la véritable indépendance. Cela ne pourra s’atteindre qu’en intégrant un marché intérieur de vaste dimension, aux richesses, talents et besoins complémentaires : celui du Grand Maghreb. Qui deviendra, avec ses immenses potentialités, un Brésil de l’Afrique. Capable de produire, à l’exemple de ce grand pays, des bateaux, des avions, des trains, et d’envoyer ses satellites dans l’espace.

 

Ceci est un autre débat. Tout d'abord, célébrons la révolte, ou la révolution, de la Tunisie. Car elle n’est pas qu’une affaire de niveau de vie ou de chômage mais, à l’encontre d’une dictature et de ses sponsors étrangers, le magnifique exemple d’une réappropriation de sa liberté.

 

Et, tout aussi important, de sa dignité.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(1)  Peter Beaumont, Victim tells of ordeal in Tunis, The Observer, 23rd january 2011, http://www.guardian.co.uk/world/2011/jan/23/tunisia-long-task-of-healing

(2)  Jacques Généreux, La Grande Régression, éditions du Seuil, octobre 2010.

(3)  Lire, relire, faire circuler (car censuré par les médias en France) sur ces comportements, notamment des anciennes puissances coloniales, l’ouvrage d’investigation exceptionnel de qualité de Lounis Aggoun : La Colonie française en Algérie – 200 ans d’inavouable – Rapines & Péculats, éditions Demi Lune, 2010.

(4)  Combien de fois ai-je surpris des interlocuteurs, ne connaissant pas les pays musulmans, en leur disant que dans ces pays des femmes se rendaient à leur travail, accompagnaient leurs enfants à l’école, en conduisant le véhicule familial.

Et, leur stupéfaction devant mon affirmation que des femmes y conduisaient des bus, des trains, et même des avions, certaines avec le grade de commandant de bord !

Il est vrai que la « désinformation », en Occident, évite soigneusement de montrer cet aspect, se focalisant sur le misérabilisme nécessaire à la propagande islamophobe.

(5) Lire les analyses du philosophe Manuel de Diéguez sur ce phénomène, notamment : Le réveil démocratique des peuples arabes et la chute d’Israël dans la bio-génétique

 

N.B.  Une grande partie de ce billet est une reprise du commentaire que j’avais posté à la suite de l’article sur le blog de mon ami Chahid : La leçon Tunisienne : le Colibri peut vaincre la vipère.

 

 

 


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2 décembre 2010 4 02 /12 /décembre /2010 13:46

 

 

"En pénétrant sous le morceau de plafond en délabrement de ta mosquée, autrefois sainte et pour les prosternations, que je foulais à présent en homme qui simplement veut voir, je sentis une brusque chaleur dans ma poitrine, un mouvement de mon cœur."

Michel Vieuchange à Smara – Sahara Marocain (1)

 

 

                                                

 

 

C’était la “Guerre Froide”.

 

Et, je survolais le désert…

 

Dans un petit bimoteur à hélice, un Piper Navajo.

 

Fasciné.

 

Pas une trace de végétation. Quelques bouquets d’épineux parfois, autour d’une trace d’eau, un puits, peut-être. D’immenses étendues de pierres, de rochers, alternant avec drapés et crêtes de dunes.

 

Gigantesques, dessinant des courbes majestueuses dans la violence de l’aridité, des méandres, de ce qui avait dû être des fleuves glissant vers la mer au cours des millénaires, au travers de végétations luxuriantes peuplées d’oiseaux, gazelles, singes et lions. A présent à sec, tel un paysage envoyé d’une des sondes de la planète Mars.

 

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Partis d’Anfa, nous avions fait escale à Goulimine, Tan-Tan, Tarfaya, Laâyoune, nous dirigeant vers Smara.

 

Bien sûr, je pensais à St-Ex et ses copains de l’aéropostale, traçant les premières routes aériennes vers Dakar, dans la même région, puis franchissant l’horizon de l’Atlantique, vers Rio et la Cordillère des Andes.

 

Aux commandes, hors pair, un américain passionné de pilotage. Il avait traversé le Groenland, survécu à tempêtes et crashs. Un joyeux drille. Astrophysicien diplômé de l’Université de Cornell, c’était un spécialiste des quasars. En année sabbatique, pour sortir la tête de ses galaxies, il louait ses services. Ne parlant pas un mot de français, qu’il considérait comme une langue morte. C’était son humour… En représailles, je le traitais d’extraterrestre analphabète. On s’aimait bien.

 

Tout jeune, j’accompagnais dans ce voyage, quatre ou cinq vieux briscards, baroudeurs des TP en “conditions extrêmes”. De ceux capables de vous construire une route, un aérodrome, entre la poire et le fromage, dans n’importe quel continent, sous une pluie tropicale, dans des vents de sable, ou une grêle d’obus. Ils avaient pour unique credo : vitesse d’exécution. Problème, j’exagère à peine : ils n’avaient aucune notion des coûts de revient.

 

J’étais là pour rappeler, discrètement, ces nécessités. Dérisoires, face aux impératifs du Temps. Autant dire que j’étais un végétarien égaré chez des cannibales. Ils me détestaient. L’empêcheur de tourner en rond. Mais, je les comprenais. Ils n’étaient pas maîtres du “coût final”… J’admirais leur courage, leur ardeur à la tâche. De grands professionnels.

 

Ce sont eux qui ont “animé” les travaux de construction de l’aérodrome d’Atar, en Mauritanie. Autre désert. J’avais été envoyé aux USA pour finaliser un achat d’engins de TP destinés à ces travaux, parmi les plus gros sur le marché. En particulier, des D9.  Le plus difficile avait été de trouver un bateau qui veuille bien faire escale au port mauritanien de Nouadhibou, pour livrer ce matériel qui devait, ensuite, emprunter la voie ferrée jusqu’à Choum, puis de là, par un épique cheminement terrestre arriver au chantier.

 

Le port n’étant pas équipé, à cette période, de moyens de levage assez puissants pour décharger ces engins, ce fut la tournée des armateurs de New York. Trouvant, enfin, un bateau qui accepte un détour vers la Mauritanie, équipé de ses propres grues pour déposer les engins sur le quai. La routine.

 

 

Le losange et la baguette de pain

 

Cette expérience a été l’occasion de mes premiers pas en géopolitique.

 

Pas la poudre aux yeux, qu’on enseigne, ou les “cartes” biseautées de la désinformation qu’on affiche dans les médias. Observant, sur le terrain, dans les coulisses, les jeux et enjeux, entre grandes et moins grandes puissances. Le plus souvent, stupides, cruels. Pour une poignée de dollars, d’orgueil, d’obscurantisme, d’infantilisme…

 

Pourquoi cette irruption d’aérodromes, à construire, rénover, allonger, renforcer, doubler, dans le désert, aussi soudaine qu’une crise d’urticaire ?...

 

Une guerre venait d’éclater.

 

Fratricide.

 

L’Algérie, alliée à la Lybie, attaquait le Maroc. Par surprise. Instrumentalisées, dans cette partie de bras de fer obsessionnellement imbécile, entre deux nomenklaturas planétaires idéologiquement antagonistes : Ouest et Est…

 

L’Espagne, Franco agonisant, venait de “rétrocéder” le Sahara Marocain qu’elle occupait, malgré une longue résistance armée du Maroc qui a duré de 1884 à 1937. A l’exemple d’autres pays colonisateurs, ignorant pendant des années les injonctions de l’ONU. Du temps où l’ONU avait encore un semblant de respectabilité. Notamment sa résolution 2072, du 16 décembre 1965, lui imposant de prendre les mesures :

« … immédiates et nécessaires pour la libération des territoires sous administration coloniale de Sidi Ifni et du Sahara Occidental… ».

 

Immédiates et nécessaires…

 

Car, France et Espagne avait découpé le Maroc comme une baguette de pain. En 1900, puis 1904. Du nord au sud.

 

En tranches alternées : une tranche du nord pour l’Espagne correspondant aux provinces du Rif, une tranche au centre pour la France accaparant les meilleurs terres agricoles et les mines, la suivante pour l’Espagne avec la portion du Sahara dit Occidental ou en espagnol Rio de Oro, plus au sud, la dernière tranche du Sahara Marocain pour la France qu’elle a érigée, par la suite, en Etat indépendant : la Mauritanie.

 

Et, encore avait-il fallu calmer l’Allemagne qui estimait que le Maroc lui revenait en tant que colonie, dans son intégralité !... La Conférence d’Algésiras en 1906 avait calmé son empereur, avec le renfort des Anglais qui commençaient à s’inquiéter des appétits germaniques. Il en était reparti avec des lots de consolation : Togo, Cameroun, Tanganyika, une partie du Congo, etc. Des trocs de prédateurs, suivant l’usage des mœurs diplomatiques entre « grandes puissances ».

 

Almoravid Empire

 

L'Empire Almohade

 

Le Maroc présentait, en effet, une réalité plus qu'enviable pour les puissances coloniales par sa situation géographique, sa civilisation et ses traditions, ses richesses agricoles, halieutiques et minières, son potentiel. Depuis des siècles, sous l’appellation d’Empire Chérifien, avec son administration directe, ou autonome selon un système d’allégeance renforcé par des liens matrimoniaux, il s’étendait de la Méditerranée au fleuve Sénégal et même au-delà, dont une partie du Mali actuel. Toutes ses prestigieuses dynasties n’ont-elles pas le Sahara pour berceau ?...

 

Son voisin, l’Algérie, avant la colonisation française, vivait depuis le début du XVI° siècle sous suzeraineté de l’Empire Ottoman. Cette prospère province ne s’étendait pas au Sahara qu’on lui connaît à présent. Les cartes historiques établies lors de la plus grande extension de l’Empire Ottoman (1683-1699) en attestent. Les Ottomans ne s’intéressaient qu’aux riches régions agricoles et commerçantes, réservoirs de soldats ou de contributeurs fiscaux fiables.

 

C’est la colonisation française qui a apporté le Sahara actuel à l’Algérie, en dépouillant les parties sahariennes de ses voisins, Maroc et Tunisie (les champs pétroliers d’Hassi Messaoud devraient être Tunisiens), y rajoutant les immenses territoires indépendants des ethnies Touaregs. En fait, authentiques détenteurs des richesses pétrolières et gazières de la région dont ils sont spoliés et oubliés (2).

 

Traçant ainsi, il suffit de regarder une carte, un colossal “losange” à son avantage, dans ce que la France pensait être des départements et territoires français pour l’éternité… Pourquoi se gêner quand on est en position de force ?...

 

Un exemple : le 15 mars 1900, partie d’Aïn Salah une colonne française de 1500 hommes, avec deux canons, massacrèrent, dans une orgie sanguinaire, les populations marocaines des oasis de Touat (entre 500 et 600 personnes) avant de rattacher ces régions à l’Algérie : Gourara, Tidikelt, Sbaa, plus tard Tindouf. (3)

 

Autre exemple : la France s’emparant des mines de fer du Sahara Marocain de Zouerate, M’Haoudat, El Rhein, F’derik, qu’elle rattacha à la Mauritanie. Regardez le tracé de la frontière entre Sahara Marocain et Mauritanie : de rectiligne, en escalier, il évolue en demi-cercle pour englober les bassins miniers…

 

Le Sahara dans son ensemble, de l’Atlantique à la Mer Rouge, représente 10 millions de KM2. Seuls deux endroits font l’objet d’une campagne médiatico-politique “d’indépendance”, de la part de certains lobbies. Bizarre. Le Darfour, au Soudan, mais là c’est plus que facile à comprendre puisqu’il s’agit, pour les pays occidentaux, de s'approprier les immenses gisements d’uranium. Mais, le Sahara Marocain ?...

 

Je cherche à comprendre…

 

A ce moment là, il convient pour les “zélotes de l’Indépendance” d’être cohérents et de lutter pour “la libération” de toutes les ethnies du Sahara dans une balkanisation, une libanisation, ou une fédération, de ces populations en redessinant Mauritanie, Mali, Niger, Tchad, Soudan, Lybie, Egypte, etc. A commencer par le Sahara Algérien…

 

Pourquoi pas ?... On pourrait, par exemple, définir un pays en regroupant les populations parlant la langue mère de tous les dialectes Touaregs : le Tamacheq. Les Kel Ahaggar, les Kel Ajjar d’Algérie ont plus de points communs avec les Kel Aïr ou les Kel Gress du Niger, ou encore les Kel Achar ou les Iullemmeden du Mali qu’avec les paysans de la Mitidja ou les montagnards de Kabylie…

 

Subitement, là : silence !...

 

Alors que le Sahara Marocain fait l’objet d’un acharnement curieux de la part de l’Algérie (la Lybie a fini par quitter la partie …), ni gaz, ni pétrole, même réduit à sa portion congrue par la colonisation européenne dont elle a bénéficié des “plus gros morceaux”…

 

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Empire Ottoman à son apogée

 

Et pourtant c’est un tas de ruines que, de mauvaise grâce, les espagnols rétrocédaient au Maroc… Pas de quoi être envieux !...

 

Quand les espagnols sont arrivés, le Sahara Marocain vivait en équilibre harmonieux avec ses voisins, dans des échanges commerciaux par les grandes routes caravanières, allant des villes impériales marocaines et des riches régions agricoles du Souss Massa jusqu’aux fleuves africains. Une zone tribale certes, mais prospère et vitale pour le commerce entre Afrique méditerranéenne et sub-saharienne.

 

Le colonisateur espagnol n’était pas intéressé par ce commerce séculaire entre pays dont il n’avait aucun contrôle. Trop aride pour y fonder une colonie de peuplement s’appropriant les meilleures terres, aucune richesse minière facilement exploitable, nous n’étions pas au Pérou, il en a tout simplement fait une plateforme de contrebande. Pour écouler les produits de son industrie à travers l’Afrique. Tout, jusqu’aux casseroles et, plus tard, la bassine en plastique. “Tout”, sauf, les armes, évidemment.

 

Cassant l’essor économique de la région en bouleversant les circuits d’échanges, la précipitant dans la paupérisation, car ses marchandises n’acquittaient aucun droit de douane, ni taxe. De plus, à des prix de dumping, cette contrebande tuait dans l’œuf toute émergence d’une petite et moyenne industrie locale dans les pays inondés de ses produits auxquels, s’ajoutaient ceux du colonisateur français ou anglais.

 

C’était une chasse gardée de l’armée espagnole, qui y entretenait le minimum d’infrastructures. Vivant confortablement, du moins sa hiérarchie, je parle évidemment des galonnés vivant dans les dorures des palais madrilènes, avec leurs copains industriels, soutenus par leurs politiciens et médias ripoux. Nullement gênée d’installer la misère, jouissant du partage de la contrebande entre commerçants des Iles Canaries et chefs de tribus "au service de l’Espagne", chargés du transport.

 

Un pays laissé à l’abandon, pratiquement sans route, ni écoles, universités, hôpitaux, dispensaires, centres de formation. Ils n’avaient même pas formé un télégraphiste ou un mécanicien. Rien. Du pur bénéfice pour les “patrons” de ce système mafieux.

 

Evidemment, la « rétrocession du Sahara » au Maroc perturbait un fructueux trafic …

 

 

Du sang dans le sable

 

Soudain, au moment où le Maroc, mobilisant ses meilleurs cadres, ingénieurs et techniciens, s’employait à redresser la situation désastreuse laissée par le colonisateur, apparurent des colonnes infernales, surgissant, déferlant, avec une puissance de feu inimaginable. Semant la mort et la désolation.

 

Visiblement, une action longuement, minutieusement préparée. Des colonnes de centaines de pickups Toyota 4x4 tout terrain, militarisés, dotés d’un équipement ultramoderne, télécommunications, mitrailleuses de gros calibre, mortiers lourds, missiles antiaériens, missiles antichars.

 

Maîtriser pareil équipement suppose une longue formation, une coordination de grande fiabilité, une organisation logistique de haut niveau : approvisionnement en continu de munitions, pièces détachées et pneumatiques, eau, carburant, etc. En cumul, des milliers d’heures d’entraînement. En matériel, des dizaines de millions de dollars.

 

La planification opérationnelle d’actions d’un tel niveau d’intensité, repérages, choix des objectifs, agencement des moyens, implantation des dépôts-relais, demande des mois de conception et d’études. Lancer une telle guerre dans le désert représente au minimum : cinq années de méticuleuses préparations. Seules des armées professionnelles, adossées à des budgets considérables, peuvent maîtriser cet ensemble de paramètres.

 

Officiellement, ce n’était pas une guerre. Dans ce désert de cailloux et de sable, c’était le “mouvement de libération” d’une population se soulevant contre une invasion marocaine… Version des médias et politiciens aux poches bourrées de pétrodollars. Dans le jargon des traîneurs de sabre, on appelle cela une guerre “proxy” : par procuration, sous un masque, le pyromane se déguisant en pompier...

 

J’ai des souvenirs qui me hantent.

 

Comme cette équipe d’entretien d’une route ensablée par les vents entre Tan-Tan et Tarfaya, pourtant partie sud du Maroc non contestée par les voisins, dont on n’a plus retrouvé trace. Sauf des camions brûlés, criblés de balles et une niveleuse, la cabine du conducteur, déchiquetée, maculée de sang. Les trous dans les tôles épaisses montrant qu’on avait tiré sur un engin civil avec une arme de guerre lourde de type mitrailleuse. Les commandos algéro-libyens avaient emmenés avec eux, mêmes les corps des tués. Repartis, leur forfait accompli de l’autre côté de la frontière. Qui était vivant ou mort ?...

 

Il se trouve que le DRH de cette entreprise marocaine était Algérien. Les familles venant lui réclamer le corps de leurs parents, ou des nouvelles, je voyais dans son regard qu’il pleurait de rage silencieuse devant cette tragédie enfantée par des politiciens voyous.

 

Car, des Algériens travaillaient en paix au Maroc. Occupant souvent des postes de responsabilité, mariés avec des marocaines pour certains. Alors que tous les Marocains venaient d’être expulsés d’Algérie pour cause de « solidarité dans la lutte pour l’indépendance du Sahara », son gouvernement fermant hermétiquement la frontière. Obligeant ainsi des familles, pour se réunir, à transiter par la France ou l’Espagne…

 

Un autre souvenir : Bir Anzaran.

 

Pas une ville, au Maroc, qui n’ait une avenue ou une place portant ce nom. Chargé d’émotion, de respect, de symbole. Dont on ne parle jamais, parce qu’il est inscrit dans le cœur de chacun.

 

A une centaine de km de Dakhla. Un matin du 14 novembre 1979, plusieurs colonnes composées de centaines de véhicules, on en a dénombré 500, encerclent la petite garnison. A 6 combattants en moyenne par pickup cela représente 3000 hommes. La garnison s’est battue pendant des heures, sans possibilité de renfort. A court de munition et au corps-à-corps, le chef de la garnison, avant de détruire sa radio et ses codes, a demandé aux mirages de l’Armée de l’Air Marocaine de bombarder ses retranchements plutôt que de se rendre.

 

L’héroïsme de ces hommes a marqué un coup d’arrêt à ces agressions d’envergure. Et, accéléré la réactivité du pays soumis à des attaques aussi cruelles qu’injustes.

 

C’était oublier que le Maroc, s’il bénéficie d’excellents agriculteurs, artisans et maçons, possède parmi les meilleurs officiers et hommes de troupes, ingénieurs et cadres. Au moment de l’attaque de son territoire, le Maroc était un des Etats qui avait le budget de défense parmi les plus faibles par rapport à son PIB.

 

Il fallut acheter du matériel militaire qu’il n’avait pas, du moins en quantité suffisante pour faire front à l’énormité de l’assaut qui lui était livré, notamment des hélicoptères, blindés, missiles et toute la quincaillerie qui va avec. Première conséquence néfaste imposée par toute guerre : investir dans l’armement ce qu’on devrait affecter au développement.

 

Mettre rapidement un terme aux ballades sanguinaires des colonnes infernales, se déplaçant impunément à travers sable et rocaille, était tout aussi urgent. Elles avaient même occupé pendant une journée la ville de Tan-Tan, bombardé Laâyoune avec du calibre 120mm…

 

La solution était simple, personne ne l’a soufflée, ni proposée au Maroc. Connue dans l’histoire musulmane, elle se trouve dans la célèbre bataille dite du Fossé, en 627, lorsque la communauté refugiée autour du Prophète dans l’oasis de Médine était menacée d’extermination par l’arrivée imminente d’une armée Mecquoise de plus de 10.000 hommes dotée d'une puissante cavalerie : on construisit un fossé avec un remblai, là où il n’y avait pas de rempart.

 

Le Maroc édifia donc un “mur”, de terre, de pierre et de sable. Seule différence, avec l’époque médinoise, c’est qu’on l’équipa d’électronique de détection, radars et autres appareillages extrêmement coûteux.

 

Si mes souvenirs sont bons, la “facture électronique” était de 200 millions de dollars. Qui alla dans les caisses de l’américain Westinghouse. En actualisant, en dollars constants, cela fait très, très cher. C’est l’Arabie Saoudite qui paya, dit-on. Exact et faux, à la fois. Peut-être a-t-elle sorti le chéquier, car il fallait faire vite. Mais, dans ce jeu de poker, tout se paye, tôt ou tard, sous une forme ou une autre…

 

En fait, ce sont 6 murs que le Maroc construisit entre 1982 et 1987. Le temps qu’ils deviennent opérationnels, pour parer à toute attaque surprise de grande envergure, tout particulièrement les regroupements nocturnes de colonnes de véhicules, la France prêta quelques avions d’observation non armés.

 

Séjournant à Dakar, je voyais décoller les Breguet Atlantic de l’Aéronavale française, en début de soirée, pour patrouiller la nuit au-dessus du Sahara Marocain, surveillant d’éventuelles colonnes motorisées se dirigeant vers leurs points de rassemblement. Spécialisés dans la lutte anti-sous-marine, leurs moyens de détection leur permettaient de repérer les émissions infrarouges émises par les pickups armés. Alertant leurs contacts. Les régiments mécanisés marocains, extrêmement efficaces et bien équipés à leur tour, se chargeant de l’accueil au sol. Avec du lait et des dattes…

 

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Raminagrobis, la Belette et le Lapin

 

Nous approchions de Smara. Subitement silencieux. Nous étions prévenus des risques de missiles antiaériens SAM 7 utilisés par les commandos algériens. Plusieurs avions, dont des mirages avaient été abattus. Pour neutraliser les leurres destinés à détourner les missiles, ils tiraient des  salves de SAM 7 !... C’était faire étalage de gros moyens, la Caverne d’Ali Baba…

 

Le pilote devait éviter une approche à basse altitude, se positionner à la verticale de la piste, à environ 1000 mètres d’altitude, et descendre en spirale, pratiquement directement sur le tarmac. Du sport.

 

Une piste chaotique, à construire, à rallonger. A chaque extrémité, enterré jusqu’à la tourelle, je remarquais un char AMX 13 en veille. Smara et ses environs étaient harcelés en permanence, les routes coupées.

 

Nous avons attendu l’obscurité, pour décoller tous feux éteints et respecter la même procédure en spirale. Ascensionnelle, cette fois. Avant d’embarquer, j’ai vu les soldats de l’armée marocaine dans la pénombre, à pied, silencieux, se glisser en patrouille, prendre position à l’extérieur de l’agglomération, pour élargir, pendant la nuit, le périmètre de sécurité. Comme si c’était hier. J’ai une pensée pour ces hommes.

 

Smara, autrefois prestigieuse ville sainte. Cheik Ma El Aïnain, représentant du souverain Hassan Ier, en avait fait un carrefour d’échanges et un centre spirituel renommés sur la route des caravanes, avec ses confréries religieuses, sa mosquée, ses écoles, sa bibliothèque. Homme de paix, mais d’honneur, ce fut un des plus farouches résistants aux soldats espagnols. (4)

 

Smara, après un demi-siècle d’occupation espagnole, réduite à une bourgade aux rues de poussières de sable et d’oubli… Symbole de ces colonisations prédatrices, suivies  de ces guerres montées de toutes pièces qui font la joie des marchands de canons, le jeu des anciennes puissances coloniales.

 

Les armements coûtent une fortune à des Etats qui ont d’autres priorités que s’armer à l’infini. Les “aides généreuses”, tout autant. Elles ont un coût invisible et, encore plus, dévastateur.

 

Comment résister à des investissements dans des privatisations sans avoir à les brader pour "renvoyer l’ascenseur", lorsqu’on vous a “rendu service” ?... Comment ne pas brader ses matières premières pour entrer dans les bonnes grâces de celui dont on recherche le soutien diplomatique ?... Comment refuser des importations sans transferts technologiques, clés en main, pour plaire et complaire aux faux amis de" La Communauté Internationale", ou de l'Empire ?...

 

De concessions amicales, en abandons progressifs de souveraineté, en commençant par la souveraineté économique, technologique, on entrave sa prospérité, son développement et son accès au Savoir. N’oublions pas que l’accès au Savoir et aux sciences de l’avenir est devenu un objectif militaire pour lequel, aujourd’hui, on assassine des chercheurs en pleine rue.

 

Les campagnes actuelles d’agitation, de déstabilisation, organisées dans le Sahara Marocain, soutenues par une campagne de diffamation inacceptable par son niveau de bassesse, particulièrement en Espagne et dans les couloirs de l’UE, à l’égard du Maroc, reformant les anciens clivages de la "Guerre Froide", pourquoi ?...

 

Croire que financer par des monceaux de dollars une stratégie de la tension avec le voisin, voire un conflit armé, va détourner l’attention, le ressentiment de sa propre population devant les échecs répétés d'une politique économique et sociale, le niveau de corruption intolérable, et les montées de chômage insupportables pour les familles ?...

 

Il ne s’agit pas de faire l’apologie, ou la critique, de tel régime contre tel autre, car avant de critiquer un régime quel qu'il soit, il convient toujours de balayer soigneusement devant sa propre porte. Mais, de faire preuve de responsabilité face aux souhaits des peuples qui veulent la paix et l’emploi. Ce qui était compréhensible de stupidité pendant la Guerre Froide est devenu à présent criminel contre les peuples du Maghreb.

 

Tous les peuples, qui le composent, souhaitent l’édification d’un Grand Maghreb. Une union économique, et ultérieurement politique, de communauté de destin, à l’exemple de ce qui se passe ailleurs, en Amérique latine en ce moment, capable d’affirmer son indépendance économique et ses choix politiques qui ne sont pas ceux des "grandes puissances" en pleine décadence économique et morale.

 

On sait que l’Europe, l’Empire, s’opposeront, par tous les moyens à l’édification d’un Maghreb uni, d’un Grand Maghreb. N’acceptant jamais, qu’un ensemble solidaire et fédéré d’une population de 100 millions d’habitants, aux immenses richesses et talents, émerge en Méditerranée.

 

Suscitant tensions, guerres civiles et fratricides, pour maintenir sa partition. A l’exemple de ce qu’ils ne cessent de travailler : l’éclatement, la pulvérisation en multitudes ethniques, de l’Irak, Afghanistan, Pakistan, Iran. Et, sur d’autres continents, comme en Amérique latine.

 

Le sachant, pourquoi tomber dans le piège du culte de la désunion et du conflit se demande-t-on ?... Ouvrant la voie aux arbitrages et sollicitudes qui ne sont que de la servitude imposée. Plaçant peuples et richesses dans la main des prédateurs.

 

Oubliant la sagesse des fables de nos ancêtres, avertissant du danger des conflits entre ceux qui devraient s’entendre, mise en scène par Jean de La Fontaine dans la dispute entre la belette et le lapin sollicitant l’arbitrage, le soutien, du chat, Raminagrobis ou Grippeminaud :

 

« … Aussitôt qu'à portée il vit les contestants,
Grippeminaud, le bon apôtre,
Jetant des deux côtés la griffe en même temps,
Mit les plaideurs d'accord en croquant l'un et l'autre
. »

 

 

 

 

 

 

 

 

(1)  Penseur, poète, explorateur, frère des Hommes. Il effectuera un voyage extraordinaire, dans le sud du Maroc, en 1930 : 1400 km, partant de Tiznit pour arriver à Smara. Mourant, à 26 ans, d’une dysenterie, à Agadir, au retour de son périple le 30 novembre 1930, http://www.moncelon.com/vieuchange.htm.

(2)  Et, même, persécutés, massacrés, humiliés. Notamment au Mali et au Niger. Cas de tortures et de viols, avec comme en Palestine déshabillage public des hommes, à Ménaka, Tessalit, Aguelhok, Kidal, etc.

(3)  Mohamed Cherkaoui, “Morocco and the Sahara : Social Bonds and Geopolitical Issues”, The Bardwell Press, 2007, http://www.bardwellpress.co.uk/pdf/Sahara_2nd_Sample.pdf

(4)  Mohamed Cherkaoui, Op. Cit.

 

 

 

 

 

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25 novembre 2010 4 25 /11 /novembre /2010 18:30

 

 

« La répression ne spécule en définitive que sur la peur.
Mais, la peur peut-elle
suffire à combattre le besoin, l'esprit de justice, l'intelligence, la raison, l'idéalisme, toutes forces révolutionnaires manifestant la puissance formidable et profonde des facteurs économiques d'une révolution ? »  

Victor Serge - 1925 (1)

 

 

 

Mystères de la technologie…

 

Les satellites de surveillance en mesure d’inventorier les sournoises centrifugeuses iraniennes à travers des mètres cubes de béton, produisant à la chaîne et en catimini des bombes atomiques pour en carboniser notre civilisation, sont incapables de trouver trace d’une bande de ravisseurs et leurs “otages” enlevés au Niger.

 

Dans un désert aussi plat que la main…

 

 

Qui est qui - qui fait quoi ?...

 

Ce groupe de terroristes invisibles, se fait appeler AQMI. Nom presque sympathique. Est-ce à la suite d’une étude marketing, cela fait penser à une mutuelle d’assurances ?… Du moins une succursale, puisque son directeur général, Ben Laden, a fait savoir qu’il voulait “discuter” avec la France, pour “négocier” directement. Dans une cassette audio. Car, lui aussi, on ne le voit jamais…

 

Très sérieusement, les médias nous ont assurés que “sa voix” avait été authentifiée par les services de renseignements. Le “top” de la référence !... Les mêmes services de renseignement qui avaient certifié que Saddam Hussein possédait des armes de destruction massive, atomiques et chimiques.

 

Les mêmes médias et services de renseignements qui, la veille de l’invasion de l’Afghanistan, c’était il y a une dizaine d’années, nous avaient affirmé que Ben Laden était gravement malade, les reins bloqués, sous dialyse permanente. Apparemment, il se trouverait dans une clinique climatisée, cachée dans une grotte. Dirigeant le monde, dictant ses ordres. Dans le style “design” et “high tech” des méchants, contre qui se bat le vaillant chevalier de cinéma James Bond.

 

Mais, comment contacter l’increvable PDG de cette multinationale aux multiples filiales ?...

 

Heureusement, l’opinion publique est moins imbécile que ceux qui pondent, répandent, véhiculent pareilles fadaises. C’est dans un immense éclat de rires que les internautes se sont évertués à trouver les meilleurs moyens de le contacter, dans le désir d’aider nos brillants services de renseignements : sur son portable, via Twitter ou encore Facebook, par les Ninjas, et autres astuces… (2)

 

D’autres, avec la précision du chercheur et de l’analyste, ont fait justice de ces manipulations de l’information. L’un d’eux, Lounis Aggoun, en rigoureux journaliste d’investigation, en démonte les mécanismes dans un livre remarquable : La Colonie française en Algérie – 200 ans d’inavouable – Rapines & Péculats. (3)

 

Un des meilleurs ouvrages de géopolitique publiés en français ces dernières années. A lire et relire, pour exercer son esprit critique, et approfondir ses connaissances sur les enjeux et les rapports de force dans la région.

 

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Là, nous ne sommes pas dans les fumeuses théories académiques des pseudos “géopoliticiens” de la propagande, présentant un bazar idéologique de “chocs, chaos, « fitna » et radicalismes” en tous genres, pour affoler le chaland et brouiller les cartes.

 

Nous sommes dans la dissection ou le démontage, des faits, des recoupements, des rouages et engrenages. De l’examen au scalpel et au microscope, du magma de souffrances et de prédations, qu’on veut nous présenter sous forme de BD, avec les bons d’un côté et les méchants de l’autre…

 

Dans un émouvant, courageux, et passionnant entretien avec Silvia Cattori, le mois dernier, Lounis Aggoun en résume les grandes lignes. (4)

 

Il rappelle la criminelle responsabilité, dans la guerre civile algérienne, des services spéciaux de l’armée. Ceux sont eux qui, avec l’aide des gouvernements occidentaux dont ceux de la France, socialistes ou conservateurs, de “droite” ou de “gauche”, en ont été à l’origine et en ont alimenté les diaboliques fourneaux.   

 

Tous avaient  intérêt à éliminer une opposition (30% des votants) dont la revendication essentielle était une condamnation de la corruption de la nomenklatura, et une volonté de redistribution des immenses richesses du pays livrées au pillage des puissances étrangères (pétrole, gaz, minerais, etc.).

 

Pays, qui compte tenu de ses ressources devrait avoir le niveau et la qualité de vie de la Norvège, un climat de rêve en prime…

 

Guerre civile, nous dit-on. Des milliers de morts, de blessés, de traumatisés, des années de retard dans le développement économique, plusieurs générations sacrifiées. Un Maghreb cassé, entravé dans son édification, provocant une perte annuelle, entre 2 et 3 % au minimum, d’accroissement du PIB pour l’ensemble des pays de cette région.

 

Provocations, assassinats, attentats, sont organisés, dans leur quasi-totalité, par les services secrets pour justifier répression et soutien de l’Occident dans la défense de la civilisation. Oui : Justifier les pleins pouvoirs et la dictature militaire. Le terrorisme islamique ?...

« On peut aisément prouver que chacune de ses actions d’envergure est intervenue à un moment clé qui a eu pour conséquence de desservir le peuple algérien et de renforcer le régime. » (5)

 

Lounis Aggoun démontre l’instrumentalisation des organisations islamistes. GIA et FIS, au plus fort des violences, « travaillaient la main dans la main avec le DRS (services secrets algériens) » (6). Notamment un de leurs principaux chefs, Abassi Madani, qui était un agent infiltré.

 

De même : « L’AQMI et le DRS sont une même organisation […] Amari Saïfi (alias Abderazak el Para ou Abou Haydara), dit « le Ben Laden du Sahara », leader du GSPC. Ce « terroriste islamiste » est en réalité l’ancien commandant de la garde du ministère de la Défense algérien et un agent du DRS. » (7)

 

Dans cet exceptionnel témoignage, Lounis Aggoun, donne une décapante analyse, d’une précision chirurgicale, sur l’appareil de propagande à l’œuvre en France. Avec ses faux “experts”, agents spéciaux recyclés dans la désinformation, “intellectuels” agissant en agents d’influence, travestissant les faits, dressant les communautés les unes contre les autres, des blocs de pays les uns contre les autres, soutenant dictatures, tortures et massacres, incitant à la haine religieuse et au racisme…

 

Cette déconstruction de l’appareil de propagande qui couvre l’information et la connaissance dans notre pays, l’étouffant dans l’obscurantisme, est la partie la plus passionnante et terrifiante de ses travaux de recherche. Bien sûr, Lounis Aggoun est ostracisé, écarté, oublié, de tous les plateaux de TV et stations de radio, son dernier livre n’étant l’objet d’aucune promotion dans les grands médias.

 

Normal, trop “dérangeant” face aux mensonges dont l’opinion publique est submergée quotidiennement :

« Je mets au défi tous ces « experts » réunis, de présenter un seul élément tangible de ce qu’ils avancent sur AQMI, sinon des messages virtuels, envoyés par des terroristes virtuels, via des émissaires virtuels, qui attestent de thèses grotesques, qui se sont déroulées selon des scénarios rocambolesques, et énoncées devant des journalistes qui semblent n’avoir pour tout cahier des charges que de gober d’autant plus volontiers le mensonge que celui-ci est gros. » (8)

 

Son travail de recherche, par son niveau de qualité et de courage, rejoint celui de l’historien Suisse Daniele Ganser établissant que les attentats des années 80 en Italie étaient fomentés par les services secrets de la CIA et des armées secrètes de l’OTAN : Les Armées Secrètes de l’OTAN. (9)

 

Mais l’Occident, n’a-t-il pas un institut spécialisé, surnommé « l’Ecole des Assassins », formant chaque année des spécialistes pour des dizaines de pays vivant sous sa domination ?... (10)

 

 

pinocchio.jpg

 

 

L’Okhrana Tsariste

 

Théories du complot !”, hurlent les gardiens du Temple de la Propagande, pour paralyser toute remise en cause.

 

Malheureusement pour eux : les archives sont là…

 

Rien de plus bavard, neutre, impartial, que des archives. Infiltrations, provocations, attentats, créations d’organisations terroristes, politiques, ou même “syndicales”, organisés par les services secrets des Etats eux-mêmes… Rien de bien neuf. Procédés aussi anciens que l’Histoire.

 

Dans leur “modernité”, un des premiers exemples de ces procédés parmi les plus magistralement achevés, qui a fait école depuis, sur lequel abondent archives et témoignages, est celui de la puissante et redoutable police secrète des Tsars : l’Okhrana.

 

Après l’assassinat d’Alexandre II (13 mars 1881), face à l’ébullition de la société russe rejetant le système féodal, “tout pour les riches - rien pour les autres”, le pouvoir refusant toute évolution de son système politique s’est lancé dans un totalitarisme féroce, justifiant répression et entretenant la peur.

 

Sous le règne d’Alexandre III (1881 – 1894), ce fut le paroxysme de cette pratique organisée sur le plan institutionnel par le bras droit du Tsar, Constantin Pobiedonostsev Haut-Procureur du Saint-Synode, l’équivalent d’un Garde des Sceaux en France. C’est à lui que la Russie doit le Règlement sur le maintien de l’ordre étatique et de la tranquillité publique de 1881, en vigueur jusqu’en 1917…

 

Présenté comme un “Règlement temporaire” de « maintien de l’ordre », il fut prolongé d’année en année, avec pour finalité l’accroissement des jugements arbitraires, avec des simulacres de procès ou, encore mieux, sans procès. Argumentaire, rhétorique, idéologie, se retrouvant dans nombre de législations contemporaines de nos pays, pour en museler les libertés publiques au prétexte de “maintien de l’ordre” ou de “lutte contre le terrorisme”…

 

Cette règlementation servit de couverture à un système policier géré par un génie de l’époque, d’une intelligence, d’une ruse, hors du commun. Certains disent : d’une perversité hors norme. C’était : le lieutenant-colonel Grigori Soudeïkine.

 

Haut fonctionnaire de la police secrète, chargé des enquêtes et surveillances d’ordre politique, il élabora une implacable méthodologie fondée sur l’interaction entre infiltration et provocation. Son but n’était pas simplement d’arrêter des opposants et de les retourner comme agents de renseignements mais, progressivement, de contrôler et d’animer lui-même les mouvements clandestins d’opposition.

 

Il arrêta, ainsi, un des principaux chefs du mouvement « La Volonté du Peuple », Sergueï Degaïev, avec lequel il organisa des attentats donnant le prétexte d’arrestations assimilables à des rafles parfaitement ciblées.

 

Grigori Soudeïkine alla jusqu’à programmer l’assassinat des plus hauts personnages de l’Etat afin de prendre les terroristes en flagrant délit, et légitimer le régime de terreur : le directeur général de la police, Plehwe, le ministre de l’intérieur Dmitri Tolstoï (à ne pas confondre avec l’écrivain Léon Tolstoï…)… Du travail d’orfèvre.

 

Mais, jouer à l’apprenti sorcier est dangereux. En 1883, comme souvent dans ce contexte, sa propre créature lui échappe. Degaïev organise l’attentat de Grigori Soudeïkine. Le Tsar ne se consolait pas de sa mort… (11)

 

Il avait tort, car des élèves aussi doués, si ce n'est plus que leur maître, prennent en main l’Okhrana. Deux ex-révolutionnaires, qui accomplirent une brillante carrière dans les services secrets du Tsar, notamment : Sergueï Zoubatov et, son adjoint, Nikolaï Berdiaev.

 

Avec ces deux éléments d’exception, les services spéciaux de la Russie tsariste franchissent un pallier supérieur : non seulement, ils infiltrent les partis révolutionnaires et contrôlent leur action, mais en plus ils gèrent leurs scissions et dissensions. Provoquant assassinats et règlements de compte entre eux, pour en arriver à leur neutralisation.

 

Poussant le raffinement au plus haut point, ils vont jusqu’à créer les premiers embryions de syndicats…

 

Procurant locaux, subsides, machines à imprimer des tracts, Zoubatov et la police secrète, constituent, en 1901 à Moscou,  la « Société d’Entraide des Ouvriers des Productions Mécaniques ».

 

Devant le succès de l’opération d’infiltration et de contrôle, ils renouvellent le stratagème en avril 1904, à Pétersbourg, créant une « Union des Ouvriers Russes des Fabriques et Usines de Saint-Pétersbourg ». Le dirigeant le plus actif de ce syndicat était un pope, évidemment agent secret, Gapone. Une de leurs plus grandes réussites fut la défection d’Evno Azef, chef de l’ « Organisation de Combat des Socialistes-Révolutionnaires »….

 

Toutes les actions violentes dans les grandes villes étaient organisées par la police secrète. C’est un de ses membres, Iegor Sazonov, qui tuera le ministre de l’intérieur en jetant une bombe sur sa voiture, le 28 juillet 1904. Ces actes prouvant la nécessité de renforcer les moyens de la police, et l’élargissement de la répression, pour lutter contre le terrorisme… (12)

 

Suivant à la trace les opposants hors de Russie, la police secrète ouvre des antennes dans toutes les capitales européennes. Installant à Paris, un as du renseignement et de la provocation, Piotr Ratchkovski, qui travaillait en liaison avec les services secrets français pour faire la chasse au révolutionnaire. Au point de se permettre de tester leur efficacité et leur motivation :

« Le 29 mai 1890, la police française effectue, sur l’ordre du ministre de l'Intérieur Constant, des perquisitions chez vingt immigrés russes. Elles y découvrent des bombes et des moyens d’en fabriquer, tout ce qu’il faut pour démasquer les « nihilistes » russes, préparant un attentat contre Alexandre III.

Les conspirateurs et la police française ignorent que l’affaire a été fabriquée de toutes pièces par le provocateur Piotr Ratchkovski, qui, en 1885-1902, dirige les services étrangers du département de la police, à Paris. » (13)

 

A l’époque il n’y avait ni radio, ni TV, mais les médias, sous forme de la presse à grand tirage, étaient noyautés. Ils y avaient leurs "agents d’influence". C’est ainsi que les archives de l’Okhrana ont livré des noms de journalistes français, avec les reçus de leurs émoluments.

 

Parmi eux on trouve un rédacteur du Figaro, où il tenait la rubrique de politique étrangère, Raymond Recouly. Son nom de code d’agent de l’Okhrana était Ratmir. Il avait pour charge de chanter les louanges de la sanguinaire dictature tsariste, on disait “autocratie” pour faire plus chic, et de repérer les intellectuels opposants. Il encaissait mensuellement la somme de 500 francs par mois, somme considérable en ce début de 20° siècle… (14)

 

Ce fut à cette époque que furent planifiées les déportations massives vers la Sibérie. En fait, ce sont les très chrétiens Tsars de Russie et leurs collaborateurs qui organisèrent les premiers « goulags ». Chaque année ce sont entre 10.000 et 13.000 citoyens Russes qui furent déportés, jusqu’à des enfants de 14 ans, dans des conditions épouvantables de survie, difficilement imaginables. George Kennan qui avait pu visiter quelques uns de ces goulags de l’époque en était atterré. Il en a livré un témoignage bouleversant dans un livre publié en 1891. (14)

 

La machine répressive ne connaissant plus de limite, tout cela bien souvent sans preuve, si ce n’étaient les prétextes les plus bureaucratiques fondés sur le soupçon : « mode de pensée nuisible », « relations douteuses », « appartenance à une famille néfaste ». Signatures de l’arbitraire et du totalitarisme.  

 

Mais une police, quelles que soient la sophistication de ses techniques et la capacité d’imagination de ses éléments les mieux formés aux pratiques de la répression, ne peut servir de rempart à une révolte provoquée par l’injustice économique et sociale soulevant tout un peuple.

 

Ce fut 1917…

 

Heureusement, en France, nous sommes loin de ces comportements. Ecoutant les représentants de notre police s’offusquer qu’on puisse soupçonner que des éléments en civil aient pu jouer les “casseurs”, pour discréditer les manifestations contre la loi sur les retraites, j’en étais ému. Devant leur air choqué, ils me faisaient penser aux jeunes filles en fleur des romans de Proust, buvant leur thé le petit doigt en l’air dans leurs gants en dentelles.

 

C’est vrai, dans les autres pays, ce sont les élèves des écoles de police et leurs instructeurs qui jouent habituellement les “casseurs”, pour effrayer le bourgeois. Cela leur est crédité, dans leur cursus de formation, comme “travaux dirigés”. Mais, pas en France. Nous avons une police vertueuse. Quant à nos services secrets, ils sont angéliques.

 

Dormons sur nos deux oreilles.

 

Sinon… Entre toutes ces barbouzeries, barbes et fausses barbes… En cette période, on risque de confondre Père Noël et Père Fouettard…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(1)  Serge Victor, Ce que tout révolutionnaire doit savoir de la répression, préface d’Eric Hazan, éditions Lyber Zones, 2009, http://www.editions zones.fr/spip.php?page=lyberplayer&id_article=103

(2)  Exemple : La France doit contacter Ben Laden : avec l’aide de Michael Vendetta ?, http://www.lepost.fr/article/2010/11/19/2310452_la-france-doit-contacter-ben-laden-avec-l-aide-de-michael-vendetta.html#xtor=ADC-218

(3)  Lounis Aggoun, La Colonie française en Algérie – 200 ans d’inavouable – Rapines & Péculats, éditions Demi Lune, 2010.

(4)  Entretien de Lounis Aggoun avec Silvia Cattori, du 14 octobre 2010, en deux parties :

i)  http://www.voltairenet.org/article167288.html  

ii) http://www.voltairenet.org/article167514.html

(5)  Lounis Aggoun, entretien avec Silvia Cattori, Op. Cit.

(6)  DRS : Département de Renseignement et de Sécurité, ex-Sécurité Militaire de l’Armée Algérienne.

(7)  Lounis Aggoun, entretien avec Silvia Cattori, Op. Cit.

(8)  Lounis Aggoun, entretien avec Silvia Cattori, Op. Cit.

(9)  Daniele Ganser (professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Bâle), Les Armées Secrètes de l’OTAN, éditions Demi Lune, 2007.

(10) Inside the dark legacy of the US ‘School of Assassins’, RT, 19 novembre 2010, http://rt.com/usa/news/usa-military-school-americas/

(11) Michel Heller, Histoire de la Russie et de son empire, Editions Plon, 1997, pp. 834 – 835.

(12) Michel Heller, Op. Cit., p. 883.

(13) Michel Heller, Op. Cit., p. 854.

(14) Serge Victor, Op. Cit.

(15) George Kennan, Siberia and the Exile system, Londres, 1891, vol. 2., p. 456, cité par Michel Heller, Op. Cit., p. 836.

 

 

 


 

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28 octobre 2009 3 28 /10 /octobre /2009 18:17


Probo Koala.

 

Un nom de parfum se voulant exotique ?

 

Ces liquides de perlimpinpin, aux marges bénéficiaires colossales, dont les publicitaires aux narines poudrées veulent nous faire croire que les acheter c’est s’offrir l’extase, la renaissance, le nirvana…

 

Non. Celui d’un bateau.

 

Un symbole.

 

Celui de l’Afrique pillée depuis des siècles par des pays fondant leur prospérité sur le vol. Lui infligeant, à présent, la pollution en sus de la prédation.

 

Pour délocaliser leur usines polluantes ? Créant des emplois sur ce continent ?

 

Même pas…

 

Evacuant, vidant, déversant, expédiant, entreposant, enfouissant, immergeant, leurs déchets industriels les plus toxiques. Avec des complicités locales. Evidemment.

 

Pour ne pas avoir à les traiter, les neutraliser, les éliminer. Trop cher. Rentabilité oblige. Profits mirobolants exigent.

 

Dans le silence des nomenklaturas de la « mondialisation » au pouvoir.

 

Ténors, barytons, histrions, cinéastes, vidéastes et médias spécialisés dans le fructueux BCE, Business du Catastrophisme Ecologiste, ne se mobilisent pas.

 

Normal. Pas de pingouins mazoutés, de tortues prenant des sacs plastiques pour des méduses, de chimpanzés en mal de bananes, de gentils dauphins coupés en rondelles par les méchants japonais…

 

La planète n’est pas en danger. Il ne s’agit que d’Africains. Cause « invendable ». En Afrique : crever de faim, de massacre ou de pollution, où est la différence ?…

 


 

Enfants de Côte d’Ivoire intoxiqués
par les déchets industriels expédiés depuis l’Europe.

 


Les industriels, dont les processus de fabrication induisent des déchets toxiques, s’en débarrassent comme ils peuvent. Suivant le principe du "sauve-qui-peut", malgré grandes déclarations et publicités mensongères sur leur constante préoccupation du bien de la collectivité.

 

Les Ponce Pilate industriels s’en lavent les mains. Passant le relais à des entreprises de retraitement qu’elles payent pour cela. Sans contrôle des autorités sanitaires des pays producteurs de ces déchets toxiques. Qui, bien souvent, les « cèdent » à leur tour à d’autres entreprises ou organisations.

 

En fait, quasiment personne ne retraite ces déchets. C’est ainsi que les côtes somaliennes sont infestées, depuis des décennies, par des largages de fûts et autres conteneurs de déchets hyper toxiques en provenance d’Europe ou d’Amérique du nord. Certains étant simplement enfouis sur les plages, à moins d’un mètre de profondeur.

 

Peu de pays africains échappent à ce fléau. L’Afrique devenant une poubelle des pays industrialisés. La fosse commune d’authentiques crimes écologiques.

 

L’un d’eux a soulevé beaucoup d’émotion en Grande-Bretagne, ce mois-ci. Mettant en lumière les effets pervers d’une mondialisation non maîtrisée, ou plutôt parfaitement maîtrisée par des industriels voyous. Les Al Capone, non plus de la Prohibition mais de la Mondialisation. Avec leurs manœuvres, manipulations, intimidations, judiciaires, politiciennes, mafieuses, allant jusqu’à étouffer la liberté d’expression.

 

Le bateau Probo Koala avait été affrété, en 2006, par une multinationale d’origine britannique Trafigura, du secteur de l’énergie, des mines, et des matières premières. Pour déverser 500 tonnes de déchets extrêmement toxiques en Côte d’Ivoire, censés être enfouis dans 18 endroits des environs de la capitale, Abidjan.

 

Peu de temps après l’exécution de cette opération sont apparus, à grande échelle dans la population, des signes d’intoxication graves entraînant de nombreuses hospitalisations et la mort rapide d’une quinzaine de personnes.

 

Un rapport d’experts internationaux, le Minton Report (1), publié en septembre dernier, a estimé que l’intoxication avait atteint un minimum de 108.000 personnes. Confirmant qu’il s’agissait bien d’intoxication en provenance du déversement de ces déchets « … capables d’entraîner de graves conséquences sur la santé humaine, y compris la mort ».

 

Les analyses d’un laboratoire hollandais ont identifié de très dangereux poisons dans le cocktail répandu par ce groupe international : notamment 2 tonnes de sulfure d’hydrogène, un gaz mortel qui présente la particularité d’une odeur d’œuf pourri.

 

Au-delà de cet acte criminel, il est saisissant d’assister au réflexe d’impunité de ces groupes internationaux depuis la publication du Rapport Minton, début septembre 2009.

 

Loin de faire amende honorable et tout ce qui était en son pouvoir pour immédiatement soulager, indemniser les victimes, s’engager à exercer ses responsabilités, revoir ses procédures de fabrication et d’élimination des déchet de sa production, la direction du groupe Trafigura a lutté avec acharnement pour étouffer l’information, fort de l’appui de la justice et la complicité des politiciens.

 

Loin d’aller en prison, les dirigeants et les actionnaires du groupe, dans l’arrogance de leur puissance financière, menacent journaux et citoyens souhaitant défendre la liberté d’information, d’expression. Et, le respect des « droits de l’homme » qui commence par celui de sa santé…

 

Sans Internet et Twitter, l’affaire aurait été étouffée.

 

Dès le 11 septembre (date sinistre…) 2009.

 

Avec son bataillon d’avocats, Trafigura obtenait des tribunaux britanniques une « injonction », un jugement en référé dirait-on en France, interdisant aux médias de faire état, par des citations, du rapport Minton. Jusqu’à interdire la simple mention du nom : « Minton » !

 

Sous prétexte d’éviter toute diffamation à l’encontre de ce groupe. Tous les journaux britanniques ont dû se plier à cette mesure, notamment The Guardian, qui avait été courageusement en pointe sur ce dossier.

 

Totale irresponsabilité. Censure absolue.

 

Plus grave…

 

Lorsque des parlementaires ont évoqué cette affaire (interpellation du Ministre de la Justice) devant le parlement britannique. Trafigura obtenait, à nouveau, de la justice britannique une injonction interdisant aux médias britanniques de mentionner ce débat parlementaire, par des citations, ainsi que toute mention du rapport et commentaires échangés par les élus du peuple dans l’enceinte du parlement…

 

Il fallut attendre un mois (2), pour obtenir que le groupe Trafigura ne s’oppose plus, devant la colère de l’opinion publique, à la libre circulation des informations et débats sur ce scandale qui dépassait le cadre du désastre écologique et humanitaire pour s’installer dans celui, tout aussi préoccupant, de la liberté d’expression d'une « démocratie ».

 

Consultez le site et la luxueuse présentation du groupe Trafigura (3), vous pourrez y lire la larme à l’œil combien ce groupe est soucieux du bien collectif. Affirmant la main sur le cœur pratiquer ce que ses dirigeants appellent le :

« … long-term support of the communities in which we operate ».

 

Hypocrisie ?… Déni de la liberté d’expression ?…

 

Totalitarisme de la voyoucratie industrielle, tenant politiciens et juges par les bourses (caisses électorales, comptes dans les paradis fiscaux, entre autres…) ?…

 

Probo Koala.

 

Avant tout,

 

… le nom d’un crime.

 

 


 

 

(1)  http://wikileaks.org/wiki/Minton, rapport téléchargeable à partir de ce site.

(2)  Mary Bowers, Trafigura report on dumped waste in Ivory Coast revealed, The Times, 17 octobre 2009, http://www.timesonline.co.uk/tol/news/uk/article6878956.ece

(3)  http://www.trafigura.com/, présentation du groupe téléchargeable à partir du site.

 

Photo : The Guardian

 

 

 


 

 

 

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11 avril 2009 6 11 /04 /avril /2009 10:46

 

 

Tu devais rejoindre Zanzibar…

 

Après avoir croisé au large de la Somalie et longé les côtes du Kenya, avant d’aborder les eaux de Tanzanie.

 

Tu y étais attendu. Avec admiration et affection. Toi et les tiens.

 

 

 

 

Mais, “Elle” a trouvé le moyen de te tuer avant d’y parvenir.

 

Elle ?...

 

Oui. La “Connerie Humaine”.

 

Sur ton voilier, le Tanit, devant ta femme et ton enfant.

 

Sous forme d’une bande de connards se mitraillant.

 

Les uns jouant aux pirates et les autres aux cow-boys. Ou aux Terminator. Comme dans un jeu vidéo…

 

Quand on connaît l’extrême exiguïté des lieux de vie d’un voilier de 12 mètres, avec 10 personnes à bord, cinq passagers et cinq “pirates”…

 

Donner l’ordre de prendre d’assaut pareils locaux, il faut que les bureaucrates concernés aient les neurones enrobés d’une couche abyssale d’imbécillité.

 

De “vive force”, disent-ils. Il est vrai que s’il s’était agi de membres de leurs familles, ils auraient pris le temps. Ils auraient même trouvé du temps au temps…

 

Devant l’étendue de leur irresponsabilité, ils prétendent se couvrir, via leurs relais médiatiques, en salissant ta mémoire. Se donnant l’air martial, “banane” au vent, bravache, cravache et cravate…

 

Pauvres mecs…

 

Tu portais un nom magnifique : “Lemaçon”.

 

C’est avec des gens de ta trempe que l’Humanité avance, se construit. Tu croyais en la Paix entre les hommes et souhaitais un monde de compréhension, de dignité et de fraternité.

 

Tu vois, la Connerie Humaine ne supporte pas des gens comme toi. Elle ne parle que le langage des armes. Ta seule vue, ta seule existence, déclenchent son prurit irrépressible : tirer dans le tas.

 

Les Hommes de la Mer saluent le Grand Marin que tu étais. Les Hommes de Bonne Volonté te pleurent.

 

A Zanzibar, pour la Paix de ton Ame, on a déposé des fleurs sur l’écume de l’Océan…

 

 

 

 

 

 

 

 

Photo : The Guardian – 10 avril 2009

 

 

 

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4 mars 2008 2 04 /03 /mars /2008 10:45


Vous devez connaître du Kenya, ses célèbres coureurs de fond, ses Masaïs folklorisés, ses safaris photos, avec les inévitables animaux “en voie de disparition”. Filon inépuisable des documentaires animaliers.

 

Ou ses Lodges, ces clubs de vacances dans des “réserves” pour frénétiques de la photo. Pour agrémenter votre petit déjeuner, des rabatteurs y dirigent, vers votre terrasse, des animaux prétendus “en liberté”, afin qu’entre le pot de marmelade et la tasse de thé, vous puissiez prendre le cliché de l’éléphant ou de la girafe, qui épatera votre entourage …

 

Romantique impénitent, j’ai vibré devant le couple Robert Redford et Meryl Streep, survolant le Kilimandjaro (1), lors de leur ballade amoureuse, vers Mombasa et ses plages, dans Out of Africa (2). Vous aussi, probablement, si vous avez vu le film… Tout en ne supportant pas le roman de Karen Blixen, d’une mièvrerie insipide (3). Très “petit blanc”, chez les gentils sauvages…

 

Kenya… Pays magnifique (4), béni des dieux se dit-on. Berceau de l’humanité, où dans la Rift Valley se trouve une concentration extraordinaire de traces des premiers êtres humains. Des ancêtres de l’Homo Sapiens. Il y a des millions d’années. Comblé par la nature, terres fertiles, savanes, déserts, lacs, rivières, montagnes et océan.

 

Toutefois, comme souvent dans ces contrées de rêve, derrière le rideau touristique, hors des circuits balisés par les agences de voyage, la misère affleure, vous agrippe, vous colle aux yeux. Plus de 60 % de la population de Nairobi vit dans des bidonvilles. Le suintement de la révolte…


L’histoire du Kenya est une des plus tragiques du continent. Longtemps, il a lutté à armes inégales contre la colonisation européenne. J’avais appris, incidemment, que sa guerre d’indépendance avait été aussi atroce que celle de l’Algérie. Presque, la même période : 1952 – 1963.

 

Si vous voulez traverser le décor de papier glacé des catalogues des Tour Operators, et rencontrer l’authentique Kenya, mettez votre main dans celle d’un homme hors du commun : Ngugi wa Thiong’o.

 
 
  Nguigi.jpg
 
 
 

Ecrivain, homme de théâtre et intellectuel africain. Aucun guide touristique ne le mentionne, ni ne le recommande, dans sa liste d’ouvrages à lire, avant de visiter le pays (5). C’est bon signe. Autre signe, plus sérieux : c’est un des écrivains préférés d’Edward Saïd, qui le cite souvent (6). Ce qui vaut plus qu’une référence ou un prix Nobel…

 

Renommé dans le monde anglophone. C’est l’âme du Kenya. Une des grandes voix de l’Afrique. Celle qui se tient debout, qui dit non au pillage de ses richesses, non à la destruction de sa culture, de ses langues. Exemple de courage, de dignité, de don de soi. Pour son peuple, son pays, l’Afrique et l’Honneur de l’Humanité.

 

Né en 1938, baptisé “James Ngugi”, il a rejeté ce prénom et repris celui de son ethnie Kikuyu : wa Thiong’o. Il décida, dès les années 70, d’écrire dans sa langue natale : le Kikuyu (7). Ses œuvres n’étant traduites en anglais qu’ensuite (8).

 

Il n’a jamais cessé de dénoncer la colonisation britannique. Il avait souffert du mépris et de la spoliation du colon. Vivant comme Crésus, de la culture, du café, du thé, de l’élevage, sur les meilleures terres volées aux habitants du pays. Dans l’arrogance du conquérant fort de ses armes, venu “civiliser des barbares”…

 

Traumatisé à 12 ans, d’avoir vu les instituteurs britanniques fouetter publiquement un de ses camarades de classe, pour avoir parlé Kikuyu dans la cour de l’école. Sa mère, comme beaucoup de femmes Kenyanes, a subi viols et  tortures, pendant la guerre d’indépendance. Ses frères, plus âgés, étaient des combattants de la résistance.

 

Tout aussi vigoureusement, encore, il s’indignera de la néocolonisation qui suivra l’indépendance. Gérée par l’oligarchie corrompue de son pays, au service des anciens maîtres occidentaux. Des dictateurs formatés, soudoyés, protégés, par l’ancien colon. Son pays a enduré la dictature de Kenyatta, puis celle d’Arap Moi. Avec les simulacres d’élections imposées par le “civilisateur”, paravent de ses vols…

 

Ne pas se taire. Témoigner des ravages sur les subtils équilibres sociaux, économiques, et ethniques, élaborés par les siècles d’Histoire. Des saccages sur les liens familiaux, la culture, la mémoire, de sa civilisation ancestrale. Dans ses romans, son enseignement, ses pièces de théâtre. Passionné de théâtre, il avait fondé une troupe.

 

Irritant la crapulerie ambiante, la répression allait s’abattre sur lui. Fin 1977, une de ses pièces de théâtre (9) où il brocarde le pouvoir et sa corruption effrénée, est le prétexte pour l’arrêter. Emprisonné un an, sans procès, sous le régime du Public Security Act, pour atteinte à "l’ordre public".


Aujourd’hui, on aurait trouvé des armes et des tracts sous son lit, comme par hasard. Il aurait été jeté dans les oubliettes, sous prétexte de “terrorisme”, ou enfermé dans une cage en fer. On n’arrête pas le progrès. La chasse à la liberté d’expression est identique. Mêmes méthodes, nouvelles formules sémantiques… 

 

Sous la pression internationale, du moins des intellectuels et écrivains, il fut libéré au bout d’un an. Mais, tout lui était interdit et son poste d’enseignant, supprimé. Il ne lui restait plus que l’exil. Son talent reconnu lui a ouvert les portes de plusieurs universités, en Grande-Bretagne et aux USA, où il enseigna la littérature comparée.

 

Il avait juré de ne revenir dans son pays qu’après le départ du dictateur Arap Moi. Ce qu’il fit, en août 2004. Après 22 ans d’exil. Son retour a été vécu comme un moment de joie, acclamé par des milliers de ses concitoyens. Et, comme toujours en Afrique, par des chants et des danses. Dès l’aéroport. Manière, au peuple, de démontrer son mépris aux dictateurs.

 

Les crapules ont le bras long. A peine installé, quatre malabars, qualifiés le lendemain par la presse officielle unanime de “cambrioleurs”, se sont introduits dans son domicile, lui faisant vivre l’horrible scène de violence d’Orange Mécanique (10). Tabassé, torturé (brûlures de cigarettes, entre autres), devant sa femme. Sa femme violée, sous ses yeux. Volonté de le déshonorer, de l’intimider, de le détruire.


Trop grand pour la caste politique affairiste, corrompue et vendue à l’Occident. Trop dangereux, pour les intérêts de leur maîtres. Il a compris. Le règne, des Al Capone locaux et occidentaux, perdurait. Il est reparti en exil.

 

Kenya… Déchiré, actuellement, par une guerre civile larvée, que les médias sont incapables d’analyser. Se limitant au copié-collé des communiqués du secrétariat général de l’ONU ou de l'OUA, saucissonnés en Grande-Bretagne par les pubs des ONG : “… Donnez-nous de l’argent pour sauver les petits kenyans qui meurent de faim…”. Ce Charity Business, immonde escroquerie à la bonne conscience…

 

Endetté à n’en plus finir. Sous perfusion permanente de la Banque Mondiale, qui dirige en fait le pays. On nous présente un président soutenu par l’Occident, détesté, méprisé, s’accrochant au pouvoir dans des élections truquées. Kibaki, qui avait succédé à Arap Moi, en 2002. Face à lui, le représentant de "l’opposition", Odinga. Les deux, bourrés de milliards à ne plus savoir qu’en faire… Des “élections sous haute tension”, nous ânonnent doctement les médias…

 

Comment en arrive-t-on, devant ce théâtre de marionnettes, à gober ces saloperies ?...

 

Nguigi wa Thiong’o, le cœur et la mémoire de son peuple, pleure de rage. Sauvant son âme par la dérision, la satire. Nous… Anesthésiés…

 

Pour comprendre les racines de cette violence, je vous conseille un livre écrit par une historienne américaine, Caroline Elkins, spécialisée dans l’histoire coloniale du monde anglophone et ses violences. Une œuvre magistrale. Un exemple de probité et de rigueur.


Accueilli, dès sa publication, dans la haine, par toute la presse officielle et les historiens de la nomenklatura britannique, défenseurs du “négationnisme colonial”. En Grande-Bretagne, cette mafia domine tous les médias et régente l’édition des livres scolaires… Phénomène similaire en France, ou dans d’autres puissances coloniales…

 

Dix ans de travaux, sur la guerre d’indépendance. Près de 500 pages de recherches  minutieusement documentées, malgré les destructions des traces et preuves effectuées par l’ancienne puissance coloniale, dans plusieurs pays et sur le terrain, à la rencontre des résistants, hommes et femmes, survivants de cette ère de terreur (11).

 

A la lecture de ce livre, j’en ai eu l’estomac et le coeur retournés. Pourtant solidement arrimés, par des vécus qui vous forgent… Livre coup de poing. A vomir toute la logorrhée du “Clash des Civilisations“, pendant des générations... Au paroxysme de la violence de l’homme se croyant supérieur à l’autre, dans le racisme, le sadisme, et la bonne conscience de l’occidental s’estimant maître de l’univers :

 

Britain’s Goulag – The brutal End of Empire in Kenya

 

C’est la clé de la compréhension de la violence actuelle au Kenya. La colonisation britannique a duré presque un siècle. S’installant progressivement, dès 1873. Les colons britanniques ont pris les meilleures terres, repoussant les principales ethnies, Kikuyu, Masaï, Luo, dans des réserves. Chaque colon britannique régnant comme un roi, sur des milliers d’hectares et des milliers d’esclaves ou de serfs.

 

Les révoltes n’ont jamais cessé. Après la deuxième guerre mondiale, les principales ethnies se sont unies et révoltées, en 1952. A mains nues, pratiquement. Armées de leur seul désespoir. Entouré de colonies britanniques étroitement contrôlées, le Kenya n’avait aucune possibilité de recevoir armes et médicaments. Les indépendantistes le savaient. Ce fut la grande révolte, dite : Mau Mau.

 

Le colonisateur “civilisateur”, schéma classique, réagit avec “sauvagerie”. Appliquant les techniques les plus récentes dans l’usage combiné de la force militaire (aviation - infanterie), et de la propagande. Propagande à usage de l’opinion publique britannique et occidentale. De la guerre psychologique, à usage interne au Kenya, dressant les voisins entre eux, les membres d’une même famille entre eux… Tous les moyens étant bons : de l’intimidation, au chantage alimentaire, à l’épouvante…

 

Et, surtout, science et savoir-faire de l’organisation concentrationnaire : goulags, camps de concentration. Inimaginables d’un pays “civilisé”, à la sortie de la deuxième guerre mondiale… Gérés de façon industrielle, avec ses centres de tris, ses centres de traitements spécialisés, par niveau de résistance ou de personnalités pour mieux les briser, ses panoplies de tortures, ses manuels de procédures, ses organigrammes : l’industrie de l’horreur. 

 

Tant d’atrocités, des milliers, des centaines de milliers de morts. Des humiliations extrêmes, délations forcées, mutilations, viols, noyades dans les excréments, castrations, exécutions sommaires. Le tout, sur fond de tortures systématiques et innommables.


Voir des officiers britanniques, “spécialistes” de la torture, échanger entre eux sur les mérites comparés dans le traitement des prisonniers, entre les cuire à petit feu, ou les déchiqueter par un chien féroce (12) … Les femmes, aussi maltraitées que les hommes.


Un génocide, une boucherie, contre l’ethnie la plus combative, Kikuyu. Jusqu’à 1,5 millions de personnes enfermées dans des goulags, des mouroirs.

 
Insoutenable.
 

Le plus incroyable : le Kenya n’a pas accompli le deuil de sa guerre de décolonisation. Habituellement, c’est le colonisateur qui prend soin d’occulter, chez lui, les monstruosités commises, contre les populations dont il occupait le pays. Dans sa représentation de lui-même, dans l’autosatisfaction de ses actes “civilisateurs”, jusque dans les livres scolaires, soigneusement censurés. Substituant les artifices de la propagande, à la vérité historique.

 

Fascinant, de voir comment l’ancienne puissance colonisatrice a réussi à maintenir son emprise : « Jusqu’à ce jour, il n’y a jamais eu de réconciliation officielle au Kenya. Il n’y a aucun monument commémorant la révolte Mau Mau.
Aucun enseignement destiné aux enfants pour qu’ils apprennent cette partie de l’histoire de leur nation à l’école, peu parlent de cette période dans l’intimité de leur foyer.
Et, à l’exception des proches des victimes du massacre de Hola, il n’y a jamais eu d’indemnisation pour ceux qui ont perdu des membres de leurs familles dans les camps de concentration ou les villages, ou pour les propriétés spoliées par les “collabos”
(13) ».

 

Imaginons l’Allemagne qui aurait occupé, pendant près d’un siècle, la France. Qui à son départ, à part des bases militaires, aurait laissé pour gouverner notre pays : Laval et sa clique, une milice armée jusqu’aux dents, les collabos, les gangsters tortionnaires supplétifs de la Gestapo. Enrichis par les spoliations de leur collaboration. Avec interdiction de parler de La Résistance, d’ériger des monuments à la mémoire des résistants, de l’évoquer dans les livres scolaires. Avec défense, aux spoliés de réclamer la restitution de leurs biens…

 
Heureusement, la tradition orale est vivace dans ce pays…
 

Au Kenya, des violences ont explosé à la suite d’élections truquées, en décembre 2007, se prolongeant plusieurs semaines, jusqu’en février 2008. Ces “élections sous haute tension” pour reprendre la formule imbécile des médias, ne sont pas des conflits ethniques. Mais, une révolte des anciens résistants et leurs descendants qui n’ont rien, contre la minorité des anciens “collabos” et de leurs descendants qui ont tout. Au service de l’ancien colonisateur, ces collabos conservent leurs spoliations, poursuivant leur enrichissement et leurs détournements, sous couvert “d’élections” trafiquées, soutenues par les occidentaux.

 

La fracture se retrouve dans chacune des principales ethnies, saccagées par le colonisateur pendant des décennies : kikuyu, masaï, luo, turkana… Ce ne sont, donc, pas des combats “interethniques”. C’est à une véritable décolonisation qu’aspire le peuple.

 
Et, cette lutte n’est pas prête de s’éteindre.
 
Sereinement, Ngugi wa Thiong’o le rappelle :
 

« … Il y a un autre thème que j’explore dans mes livres, spécialement dans Wizard of the Crow. L’origine des problèmes de l’Afrique n’est pas exclusivement interne, ni externe. C’est une combinaison des deux. Un bon exemple, ce sont les dictatures du 20° siècle, en Afrique, qui ont été au service de l’Occident pendant la Guerre Froide.

 

Même aujourd’hui, l’Occident est foncièrement hostile à toute démocratie authentique en Afrique et dans le Tiers Monde, parce qu’une authentique démocratie signifierait, d’abord et avant tout, que les ressources de l’Afrique seraient au service du peuple africain.


Jusqu’à présent l’Occident propose et dispose. Mais les régimes africains sont à blâmer pour se laisser réduire à des instruments de la division et de la répression permanentes du continent… » (14).











 
 

(1)   Plus haut que notre Mont Blanc (4.810 m), cet ancien volcan de 5.895 m,  se trouve, en fait, en territoire Tanzanien, près de la frontière, visible du “Amboseli National Park”.
(2)   Film de Sydney Pollack (1985), couvert d’Oscars, en 1986. Avec des acteurs magnifiques, dans des décors naturels somptueux : Robert Redford, Meryl Streep et, surtout, un des plus beaux rôles de l’acteur allemand Klaus Maria Brandauer.
(3)   Blixen, Karen, Out of Africa, Penguin Books, Londres, 2001 (première publication : 1937).
(4)   Près de 35 millions d’habitants, pour une superficie équivalente à celle de la France, 582.000 km. Frontalier de pays à “hauts risques” : Somalie, Ethiopie, Soudan, Ouganda et Tanzanie.
(5)   Exemple : le guide de la collection Lonely Planet sur le Kenya, y compris dans sa version en langue anglaise !…
(6)  Saïd, Edward, Power – Politics and Culture, interviews with Edward Saïd, edited with an introduction by Gauri Viswanathan, Pantheon Books, New York, 2001, pp. 113, 154, 253, 254, 368, 370.
(7)   On recense 70 ethnies. En fait, le peuplement du Kenya comprend trois grand groupes : Bantous (kikuyu, akamba, meru, gusii), Nilotiques autrement dit venant du Nil (masaî, turkana, luo, sambaru), et en bord d’océan : Swahilis issus d’un superbe mixage séculaire d’africains, d’arabes et de perses qu’on retrouve sur toute la côte d’Afrique de l’Est. Le Swahili est une des principales langues africaines. Lors d’un long séjour à Lubumbashi (RDC), loin de la côte donc, je me suis retrouvé dans un milieu Swahili.
(8)   Ses œuvres les plus connues sont des romans :

=>   Weep Not Child (1964), Heinemann, 1987, McMillan, 2005.

=>   The River Between, Heinemann, 1965, Heinemann, 1989.

=>   The Grain of Wheat (1967), Heinemann, 1992.

=>   The Wizard of the Crow, Harvill Secker, août 2006.
(9)   Ngaahika Ndeenda (I will marry You when I want) : “Je t’épouserai quand je le déciderai”.
(10)   “Orange Mécanique”, film (1971) de Stanley Kubrick, adapté du roman (1961) d’Anthony Burgess A Clockwork Orange.
(11)   Elkins, Caroline, Britain’s Goulag – The brutal End of Empire in Kenya, 475 p., Pimlico, 2005.
Prix Pulitzer 2006. Publié aux USA, sous le titre édulcoré (pressions obligent…) : Imperial Reckoning
(12)   “… torturing a prisoner over a slow fire… (ou)… setting a fierce dog on a prisoner…”. Counter-insurgency in Kenya : a study of  military operations against Mau Mau, Nairobi, Transafrica Publishers, 1976, pp. 44-45. Cité in Caroline Elkins, Op. Cit.
(13)   “To this day there has never been any form of official reconciliation in Kenya. There are no monuments for Mau Mau, children are not taught about this part of their nation’s past in school, few speak about it in the privacy of their own homes, and, with the exception of the relatives of the Hola massacre victims, there has never been any kind of financial consideration given to those who lost family members in the camps or villages, or property to the local loyalists”. Caroline Elkins, p. 367, Op. Cit.
(14)   Traduction d’un extrait d’entretien avec Davina Morris, Thiong’o is back, Voice on line, 11 août 2006 :

"This is another theme that I explore in my books, especially in Wizard of the Crow. The roots of African problems are neither entirely internal nor entirely external. It is a combination of the two. A good example is the 20th century dictatorships in Africa, which often served the West in the politics of the cold war. Even today, the West is basically hostile to any genuine democracy in Africa and the third world because any genuine democracy in the continent should mean first and foremost Africa's resources serving the people of Africa. But up to now, the West proposes and disposes. But African regimes are also to blame for allowing themselves to become willing tools of the continued division and repression of the continent."

 
 
 
 
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20 septembre 2007 4 20 /09 /septembre /2007 11:04


Je me souviens…
 
Un hiver. Le ressac de l’Océan…
 
C’était un mois de Ramadan, chez un ami marocain. Dans un pavillon en bord de plage, à Bouznika (1). Il faisait froid, à la tombée de la nuit. La rupture du jeûne, avec son ambiance de recueillement et de partage, était terminée depuis un moment. Un feu de cheminée, dans une ambiance familiale. Paisible.
 
On annonce une voiture. Visite impromptue. Pour la première et unique fois, je rencontre Driss Basri. Le Ministre de l’Intérieur (2). Pas d’escorte, un chauffeur, uniquement. En France, ce genre de ministre se déplace avec une dizaine de motards et deux ou trois voitures d’accompagnement… Il était en col roulé, souriant, accompagné d’un ami professeur de droit de la faculté de Grenoble, dont il était Docteur en droit public.
 
Il venait veiller et jouer aux cartes, au Tutti. Cette belote qui se joue avec des cartes espagnoles. Quittant Rabat, pour quelques heures. Je ne joue pas aux cartes, je suis nul, et mes amis marocains imbattables, surtout dans l’échange de signaux codés… Je les ai donc regardés, participant à la discussion, à propos de tout et de rien. Rire et détente.
 
L’hôte qui recevait, était un ingénieur diplômé des Ponts et Chaussées, spécialiste des infrastructures routières et aéroportuaires. Son ministère d’origine était le Ministère de l’Equipement qui l’avait détaché au Ministère de l’Intérieur, sur la demande de ce ministère.
 
On l’oublie ou l’occulte, par omission ou intention, mais le Ministère de l’Intérieur n’administre pas que du "sécuritaire". Il gère les immenses problèmes d’aménagement du territoire, d’encadrement, de développement, d’équipement, d’organisation, des collectivités locales.

Dans un contexte où ces collectivités, dans un pays en pleine croissance démographique, en cours de création ou d’organisation, n’ont pas encore l’autonomie budgétaire comparable aux modèles européens. Tout un univers avec d’immenses besoins et, comme toujours et partout, insuffisamment de moyens. Toujours ce manque d’hommes, d’argent, de temps…
 
Driss Basri est décédé le 27 août dernier, à 69 ans. Tout ce que j’ai pu lire, entendre à son propos, à l’occasion de sa disparition m’a sidéré. C’est vrai, certains le jalousaient, le détestaient, et pas toujours pour de bonnes raisons.

Mais, tant de bonnes consciences à deux sous, de faussetés, de contrevérités… Voir tous ces gens se décerner des actes de bravoure, des diplômes de défenseurs de la "démocratie" en s’essuyant les pieds sur lui. Comme toujours, la lâcheté du lynchage, le sacrifice du bouc émissaire.

Devant le spectacle de ces postures et impostures, je pense au titre du roman de Boris Vian :
J’irai cracher sur vos tombes (3)
 
 

D-Basri-1.jpg

 

Aucune compassion. Ils ont tous craché sur sa tombe...

Trop, c’est trop. C’est ce "trop", qui m’a dicté ces mots :  

 

« Si Driss, 

Tu me permettras de te tutoyer. Considère ce tutoiement comme une marque de respect dû à un mort, au souvenir duquel on s’incline. Je vais me faire l’avocat du diable. Je ne te dois rien et je n’ai rien à y gagner. Mais, l’hypocrisie, lorsqu’elle dépasse des bornes…


Je n’ai jamais travaillé avec toi, mais j’ai côtoyé, pendant plusieurs années, quelques uns de ceux que tu harcelais de travail. Car, tu étais un bourreau, oui, un bourreau de travail. J’ai l’impression de te connaître. En tout cas, mieux que toutes ces "belles âmes" qui bavent sur ton passé…
 
On t’impute tous les échecs, les ratages, les bavures, et plus encore, de ton pays. Bien sûr, en contrepoint, les mêmes s’approprient tous les succès ou toutes les vertus.
 
On te disait "tout puissant". Mais, tu savais que cette "puissance" enviée n’avait que l’amplitude que voulait bien lui assigner ton Souverain, dans les responsabilités et les missions qu’il te demandait d’exécuter.

Lui-même, tu le voyais, sujet aux pressions de tous les jeux politiques des grandes puissances et leurs seconds couteaux dans les couloirs du pouvoir. Le soumettant en permanence à une remise en cause de sa propre puissance de monarque et, surtout, de l’indépendance du pays.
 
Les qualificatifs à ton égard n’ont pas varié : "vice-roi", "grand vizir", "superflic", "maître des basses œuvres"…

La nomenklatura ne t’aimait pas. Surtout, cette "élite", cette "aristocratie", ces "grandes familles" qui ont monopolisé les meilleures places depuis l’indépendance, te méprisaient (4). Ces représentants multicartes des groupes et des intérêts étrangers. Dans la discrétion des dîners mondains.
 
Pour eux, tu étais un campagnard, un plouc. Tu sortais du pays profond. Tu venais de la Chaouïa. Ils tournaient en dérision ton parler rocailleux. Le même dédain qu’affichait la bourgeoisie affairiste parisienne du temps de Zola, pour les auvergnats. C’est, en grande partie, grâce à eux pourtant, que Paris tournait. Le travail acharné, payé une misère, des charbonniers, cochers, portefaix, lingères et autres personnels.
 
Tu travaillais vingt heures par jour. Même, des nuits sans dormir. Pendant que ceux qui te caricaturaient, dans ton dos, s’enrichissaient dans l’argent facile de la spéculation et le partage des monopoles contrôlés par les clans familiaux.
 
Responsable des "années de plomb", ne cessent-ils de répéter à ton sujet, comme des perroquets…
 
Tu vois, ils n’ont pas changé… Même disparu, ils te traitent de la même façon. Tu le savais, en te méprisant, ils se donnaient bonne conscience dans leur rapacité. Mais tu n’étais pas comme eux. Je me souviens : tes parents ont toujours habité la même maison modeste à Settat.
 
 
Le Bâtisseur
 
Settat (5). Ta ville natale, que tu as sortie de la boue. Tu voulais en faire un modèle, un laboratoire. A l’entrée de la ville il y avait un bidonville qui, en hiver, baignait dans vingt centimètres d’eau. J’en suis témoin.

Dès que tu as été nommé Ministre de l’Intérieur, en quelques années, tu y as fait construire un réseau d’assainissement, tracé des avenues, modernisé la gare, créé une université, une école hôtelière, des jardins, de splendides bâtiments administratifs, dans le style architectural marocain.
 
Et, surtout : créé une zone industrielle, convaincu que l’avenir du Maroc passait par le développement de l’industrie.  Le tourisme comme seul axe de développement, tu n’y croyais pas. Ça transforme une nation en pute, avec ses emplois sous payés, pour la richesse d’une poignée de spéculateurs immobiliers et "d’aubergistes"…

Tu y as encouragé l’installation d’usines. Je me souviens, d’une des plus grandes usines de tissus pour "jeans", du monde, qui exporte la quasi-totalité de sa production. En tout cas, la plus grande d’Afrique. C’est en sortant d’une visite de cette usine, qu’on m’a montré la maison de tes parents.

Tu as soulevé des montagnes pour que le tronçon d’autoroute Casablanca – Settat soit rapidement construit, avant de poursuivre son tracé vers Marrakech. Si tous les hommes politiques s’occupaient de leur ville natale comme tu l’as fait, le monde serait comme la Norvège.
 
On te disait obsédé par le "sécuritaire". Tu te voulais bâtisseur. Passionné d’urbanisme. A l’exemple de ton Roi, Hassan II.

Tu as créé et organisé de nouvelles "provinces", couvert le pays de magnifiques préfectures, tu as modernisé une administration tentaculaire,  avec ses écoles de formation pour les cadres, contribué à la création des Agences Urbaines dans les grandes villes pour en réguler, autant que possible, l’expansion immobilière. C’est même toi, qui as contribué à créer l’ordre des architectes. Ce ne fut pas facile…
 
Tu es à la source, avec les grands cabinets d’architectes internationaux, de tous les schémas directeurs d’urbanisme, que les spéculateurs s’ingénient, bien sûr à contourner. Comme ils ont réussi à le faire sur la Corniche de Casablanca. Défigurant le projet initial.

Tu rêvais d’un Maroc puissant, mais beau dans la grande tradition de son urbanisme des Cités Impériales. Tu luttais contre la spéculation immobilière, la plaie de ton pays, comme dans d’autres. La spéculation, le sida du "Libéralisme Economique"… Te forgeant tes pires ennemis.
 
Je me souviens…

Un jour, traversant le centre de Casablanca, dans une voiture banalisée, devant tes interlocuteurs, tu exprimais ton souci pour les immeubles "modern style". Reliquat de l’architecture de la colonisation, avec ses fers forgés, ses mosaïques et ses façades ouvragées du Centre de Casablanca. "Comment  préserver ce patrimoine historique", disais-tu ? Tu savais que les spéculateurs souhaitaient raser tout cela, pour y mettre des tours en verre…
 
Te souviens-tu ? Les colonies de pingouins se piétinant pour l’aménagement de la Baie de Taghazout (6) ? Les uns représentant des groupes français, d’autres des groupes allemands, d’autres encore des groupes espagnols, d’autres encore… Ça n’arrêtait pas ! Et, vous vous regardiez tous les deux, accablés, lucides sur la nature humaine, avec le Roi, Hassan II.

Finalement, on calmait le jeu en gelant ces dossiers. Si on avait privilégié l’un par rapport à l’autre, le Maroc et son "régime",  auraient eu droit à des commentaires injurieux, avec même des interventions dans leurs parlements respectifs, via les médias en cheville avec ces groupes. Allemands et espagnols, si on avait choisi les français, français et allemands, si le contrat était allé aux espagnols…

Le pays était fragilisé, il fallait avancer avec prudence. Quel cirque !
 
Je me souviens de la préparation de la réunion de  l’OMC à Marrakech, succédant à l’Uruguay Round. Le Roi Hassan II voulait présenter une vitrine du Maroc. La ville devait se révéler dans sa beauté.

Alors, tu as travaillé nuit et jour pour mobiliser les énergies en un temps record et rénover les infrastructures de la ville : avenues, édifices publics, ravalement de façades, constructions d’hôtels, d’un théâtre, trottoirs et plantations d’arbres… Au jour J, tout était impeccable.
 
C’était une belle occasion. Tu rêvais d’un tourisme de qualité, avec ton Roi : Marrakech ville de Congrès, festivals du cinéma et autres arts, équilibré par le développement d’une industrie. Vous ne vouliez surtout pas tomber dans le piège : vague de casinos dans le sillage d’une soi-disant jet-set, aussi pourrie que destructrice, transformant Marrakech en bordel thaïlandais. Là encore, que d’ennemis…
 
Quand on regarde le Maroc dans les archives cinématographiques de l’INA, on mesure, malgré toutes les défaillances, combien le pays a évolué par tout ce qui n’existait pas à l’indépendance : barrages, ports, aéroports internationaux, universités, hôpitaux, autoroutes, rénovations urbaines, zones industrielles, infrastructures balnéaires et hôtelières, etc.

Evidemment, tu n’étais pas le seul.  Beaucoup de gens méritants y ont contribué. Mais, tu es certainement celui qui y a le plus travaillé. Je ne sais plus qui disait : "Le Maroc n’est pas un pays de navigateurs. Il tourne le dos à l’océan. C’est un pays de bâtisseurs". Tu en fus un, des plus éminents…

"Années de plomb", ricanent-ils. Les imbéciles…
 
Je me souviens…

Tu étais un des rares ministres incorruptibles, de ton pays, mais aussi de par le monde… Et ça, ça ne pardonne pas. Bien sûr, on ne peut en dire autant de certains de tes proches ou collaborateurs, malgré tes recommandations. On a trahi ta confiance, c’est la rançon du pouvoir quand on assume des responsabilités. De nombreux agents d’autorité ne méritaient pas la corde pour les pendre. L’un d’eux, d’ailleurs, a été fusillé.

Tous n’étaient pas à la hauteur des exigences que tu te faisais d’un serviteur de sa nation. Immense administration dont tu avais hérité, que tu essayais de moderniser, surtout dans les comportements. Tâche quasiment impossible, à partir du moment où, dans le pays, toutes les administrations, et autres secteurs économiques, ne recevaient pas la même impulsion. La force centrifuge du nivellement par le bas…
 
Tu n’étais pas comme eux. Tous ces ministres qui ont leur nom attaché à la marocanisation. Tous ces défenseurs de la soi-disant "libre entreprise", ces concessionnaires de voiture et ces embouteilleurs de gaz carbonique noyé de sucre, devenus des milliardaires, de nationalisation en prévarication, de privatisation en délits d’initiés, d’hommes de paille en magouilles, protégés par leurs sponsors étrangers.

Ces milieux affairistes qui ne rêvent, eux, que d’une chose : avoir des ouvriers et des employés à leur merci, sans protection ni rémunération.
 
Tu n’étais pas comme ces pillards… Ce général qui montrait, mi-fier, mi-cynique, sa "bibliothèque". Il faisait relier tous les titres fonciers des propriétés qu’il détenait à travers le pays. Il était un passage obligé pour des tas de transactions, jouissant d’une confiance dont il abusait pour le profit d’intérêts étrangers.
 
Ou, ce Ministre de la Jeunesse et des Sports qui avait tout emporté, jusqu’à des ordinateurs, des tables et des chaises. Avant de quitter le gouvernement, le Roi Hassan II, lui a demandé combien avait coûté la construction de sa "villa", à Rabat. En fait, un véritable palais construit sur du vol et des détournements. Se croyant plus malin que son Roi, il lui annonça un chiffre ridiculement faible. Droit dans les yeux, le Roi Hassan II lui demanda alors de passer à son secrétariat pour prendre le chèque du montant annoncé de la "villa", et d’en céder la propriété à l’Etat…
 
 
Scipion l’Africain
 
On laisse sous-entendre que tu serais mêlé à l’affaire Ben Barka. Tout jeune fonctionnaire, tu étais encore très loin de ces cercles. Et puis, comme si tu avais quelque chose à voir avec ce sanguinaire, ce sadique, cet assoiffé d’argent et de pouvoir qu’était le général Oufkir.

Comploteur invétéré, à la solde des principaux services secrets étrangers. Trahissant son Roi et son pays au premier courant d’air. Et, dire que certains milieux, en France tout spécialement, le présentent comme la Jeanne d’Arc de la démocratie, lui qui a enlevé et torturé à mort Ben Barka.

N’importe quoi.

Ou, encore, on te rend responsable du centre de détention de Tazmamart, où l’armée réglait ses comptes avec ses félons. A y être, pourquoi ne serais-tu pas responsable d’Abu Ghaïb ou de Guantanamo ? On se le demande…
 
Quand j’entends de "belles âmes" dire que tu serais "responsable de beaucoup de morts et de souffrances" : quel culot ! Ces mêmes "belles âmes" qui, au cœur de la "guerre froide", ont soutenu les ennemis de ton pays, notamment dans la stupide guerre fratricide entre l’Algérie et le Maroc à propos du Sahara anciennement "espagnol", rétrocédé au Maroc.

Guerre cachée, aux enjeux multiples. Luttaient-elles pour dire : non à la guerre, oui à l’apaisement et la concorde, oui aux projets de développement et d’association en commun, dans un Maghreb uni et fraternel ? Non. Elles jetaient de l’huile sur le feu et prenaient parti contre leur pays.
 
Le conflit du Sahara est comme un coin en acier qu’on enfonce dans un chêne pour le faire éclater, en redoublant les coups de masse. Faire éclater toute tentative d’unification, de fédération, d’association, économique d’abord, politique ensuite.

Aveuglées par leur dogmatisme, ces "belles âmes" ont joué le jeu des grandes puissances, européennes en particulier, qui n’admettront jamais la constitution d’un Maghreb Uni
(7). Imaginez : un bloc de pays d’une centaine de millions de personnes, gorgés de richesses complémentaires, bourrés de talents. Face à l’Europe ? Tout, mais pas ça ! 
 
"Beaucoup de morts et de souffrances", je me souviens de ces familles d’ouvriers et cadres dont les pères, maris ou frères avaient été tués et leurs corps enlevés, alors qu’ils dégageaient la route du côté de Tan-Tan, après des tempêtes de sable. Leur raid-surprise effectué, les assassins s’étaient réfugiés de l’autre côté de la frontière.

Je me souviens de ces familles, suppliant qu’on retrouve, au moins, les corps de leurs proches pour les enterrer décemment. Je me souviens, comme si c’était hier, de la cabine du conducteur d’une niveleuse, déchiquetée de balles de mitrailleuse et maculée de sang…
 
"Beaucoup de morts et de souffrances", je me souviens de la tristesse du regard de cette française mariée à un pilote marocain, dont l’avion avait été abattu par une fusée SAM 7. On le savait prisonnier dans le Sahara algérien, mais les conventions de Genève n’étant pas appliquées elle ne pouvait, ni elle, ni ses enfants, entrer en contact avec lui. Des années. Toute une vie sans nouvelles, dans la tristesse et la dignité.
 
Beaucoup ne le savent pas, car on ne voulait pas parler d’une « guerre », mais le pays était en danger. Ce sont ces "belles âmes", leur dogmatisme, leur imposture, leur nullité, leur trahison et leur hypocrisie qui sont "responsables de beaucoup de morts et de souffrances". Pas toi.
 
Excuse-moi, Si Driss, je m’emporte... L’esbroufe, encore et toujours. Comme de la glue… Difficile à endurer…
 
Tu avais tes humeurs, toi aussi. Horripilé, étais-tu, par ces speakerines marocaines, singeant nos cruches télévisuelles françaises, celles qui confondent insolence et intelligence, cliché et culture, fardées jusqu’aux cils en "cantatrices de la lutte contre la tyrannie et la défense des droits de l’Homme" !... 

Elles qui, à longueur d’année, exploitent, sous-payent et maltraitent leurs personnels domestiques. Soutenant au passage les massacres des populations palestiniennes et irakiennes, par leur silence complice. Là, subitement, sans voix…
 
Ou, par ces journalistes français qui ne connaissent du Maroc que la vision qu’ils en ont au travers des vitres teintées des clubs climatisés, exclusivement fréquentés par la communauté française ou francophone...

Tu le savais, mais tu ne le voulais pas : acheter des journalistes, pour se concilier la faveur de leurs commentaires, te révulsait. Ils te l’ont fait payer. Mais, "communiquer" ne t’intéressait pas. Servir ton pays, en "grand commis", te suffisait…
 
Le destin t’a fait quitter notre théâtre de marionnettes. Peu de temps après ton départ pour l’au-delà, se déroulaient les élections législatives au Maroc. Tu en aurais ri. Mais, tu riais déjà : on n’a jamais autant interdit de journaux, fait de procès à la presse et emprisonné de gens, que depuis que tu as quitté tes fonctions ! Mais on va dire, encore, que c’est toi le responsable…
 
Tout d’un coup, le marocain ne s’intéresse plus aux élections. Lui, passionné de politique comme pas deux ! Il s’est abstenu, pour finalement élire en tête un parti déconsidéré depuis des lustres… Alors, des élections, on n’en parle plus. Dans les journaux, à la télévision ou à la radio. Tout simplement. Des élections : c’est quoi ça ?... Quelle farce !
 
On ne t’a rien épargné. Jusqu’à mégoter le renouvellement de ton passeport… Toi, qui as toujours été croyant, on te reprochait d’être devenu pieux dans ton exil. Ou, du moins, d’avoir des images pieuses dans ton appartement...

Jusqu’à te reprocher cet appartement, alors que le PDG le plus incompétent, qui n’a pas exercé le millième de tes responsabilités, quand il se fait virer, chez nous et ailleurs, part avec son parachute doré rempli de millions, même de dizaines de millions d’euros.

On n’a même pas respecté tes dernières volontés qui étaient d’être enterré, au milieu des tiens, dans la Chaouïa. Tu te retrouves dans un cimetière à Rabat.
 
Les minables…
 
De toute façon, poussière nous sommes...
 
Toi, tu n’as pas pillé ton pays. Tu n’as jamais trahi ton pays.
 
Tu es comme cet officier marocain, mort à Bir Anzaran (8), il y a quelques années. Des colonnes venues du Sahara algérien, surgissant de différentes directions, plusieurs centaines de pick-up Toyota armés jusqu’aux rétroviseurs, ont attaqué sa garnison. Ses positions ont été submergées, malgré la résistance héroïque de ses troupes à court de munitions.

Son dernier appel, avant de détruire sa radio et ses codes, a été de demander aux Mirages marocains de bombarder ses propres retranchements. Préférant être enseveli, lui et la poignée de survivants, avec les ennemis de son pays.
 
Tu savais ce qui t’attendait. Les calomnies t’ont submergé. L’ingratitude aussi. Tu es resté debout, tu as fait front, sous les humiliations et les médisances de la nomenklatura et ses relais médiatiques.

Comme Scipion l’Africain, qui avait sauvé Rome des menaces carthaginoises, tu aurais pu faire graver sur ta pierre tombale, en exil :
« Ingrate Patrie, tu n’auras pas mes os ».

Mais, tu es un homme du peuple, et tu sais que la nomenklatura n’est ni le Peuple, ni la Patrie.
 
Ta ville natale te doit beaucoup. Ton pays aussi. Tu l’as servi le mieux que tu as pu. Avec tes enthousiasmes et tes erreurs, tes convictions et tes doutes. Il le sait.
 
Honneur à Toi !
 
Et, Paix à Ton Ame... ».
 
 
 
 
 
 
 
 
 
(1)  Pour ceux qui ne connaîtraient pas : plage et agglomération, entre Casablanca et Rabat. Rapidement accessibles par l’autoroute Casa-Rabat.
(2)  Né en 1938, à Settat, décédé à Paris le 27 août 2007. Sa carrière s’est déroulée au Ministère de l’Intérieur, dont il gravit tous les échelons. Il occupa le poste de ministre pendant une vingtaine d’années, jusqu’à la mort du Roi Hassan II.
(3)  Roman publié en 1946, censuré en 1949. Republié plus tard. Formidable coup de boutoir contre le racisme, avec pour toile de fond les Etats du sud, aux USA. La discrimination raciale était, à l’époque, une institution protégée et encouragée par la législation américaine. Boris Vian, auteur et artiste exceptionnels, mort prématurément, a écrit plusieurs oeuvres contre le racisme et la guerre, notamment coloniale. Elles ont fait l’objet de censure dans la France "démocratique"…
(4)  Un exemple souvent montré du doigt par les marocains : le Ministère des Affaires Etrangères, du moins tous les hauts postes, squatté par le même clan familial…
(5)  Ville à 80 km de Casablanca, environ, en allant sur Marrakech.
(6)  Magnifique baie de sable fin (j’y ai joué au foot…), protégée du vent, située au nord d’Agadir. Longtemps enjeu féroce entre spéculateurs étrangers et leurs représentants nationaux.
(7) Il existe un ambitieux projet d’union, dit UMA : Union du Maghreb Arabe. Malgré plusieurs tentatives, en particulier du Roi Hassan II, ce projet est pour le moment dans les cartons, du fait de cet interminable conflit. Il devait regrouper le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, la Mauritanie et la Libye. Construit progressivement à partir d’un modèle d’union économique, il constituerait une formidable synergie entre économies complémentaires et une force de négociation incontournable. Il est évident que les "grandes puissances" feront tout pour en geler l’émergence…
(8)  Localité du Sahara Marocain, antérieurement "territoire espagnol". Sa rétrocession, par l’Espagne au Maroc, est au coeur du conflit dit du "Sahara occidental". Un des reliquats de la colonisation européenne et de la "guerre froide", entretenant une guerre fratricide pour bloquer tous les projets de destin commun…




 
 

 

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22 juin 2007 5 22 /06 /juin /2007 20:49

Brouillard1.jpg11 juin 2007. Elsa Serfass, 27 ans, membre de Médecins sans Frontières (MSF), est tuée. Son véhicule mitraillé par des "rebelles" à 500 km au nord-ouest de Bangui, dans la région de Ngaoundaï, en République Centrafricaine. 

Elle était en "
mission exploratoire ", pour le compte de cette ONG. Rappelons qu’une partie des frontières de la République Centrafricaine (1), néocolonie française atrocement pauvre mais immensément riche en diamants et en uranium, est limitrophe de la zone du Darfour.

Le sort tragique de cette "volontaire", pour lequel on ne peut qu’éprouver de la compassion, pose, à nouveau, le problème du manque de "transparence" des ONG. Car, il est plutôt curieux qu’une ONG envoie en "reconnaissance", une "volontaire", dans une des zones les plus dangereuses, actuellement, sur notre planète. 

Les ONG sont un secteur économique en pleine expansion. Nos amis anglo-saxons, très pragmatiques, l’appellent : Charity Business. Livres, séminaires, Business Schools traitent de ce qui est devenu un secteur d’activité économique comme un autre. Sauf qu’il connaît, par rapport à beaucoup d’autres, une croissance exponentielle. Il existe même des études, confidentielles pour le moment, sur l’introduction en Bourse, des plus connues … Compartiment des emprunts obligataires, dans un premier temps.

Ce sont chaque année d’énormes sommes qui y sont brassées (2) : subventions, sponsoring, mais surtout appel à la générosité publique. Ce Business est très large allant de la protection des espèces, de l’environnement, à celle de « l’Homme ». Il ne faut pas l’oublier cette espèce en danger… D’où le succès des organisations "humanitaires". Mais, il est difficile d’y voir clair : rôle, financement, fonctionnement, contrôle ?...


Gribouille ou Rambo ?

Bizarre le rôle de certaines ONG en Somalie, par exemple. Nous l’avons tous remarqué. Sous prétexte d’aller d’une zone "rebelle" à l’autre, elles versaient des droits de péage (en argent ou en nature) à différentes milices et leurs chefs de guerre, rétribuant des escortes armées, contribuant ainsi à perpétuer un conflit intolérable pour les populations civiles.

L’attitude ambiguë, de certaines ONG, s’est même retrouvée sous un jour étrange, lorsque des français ont été arrêtés en Serbie. Au plus fort des bombardements de l’OTAN. Arrêtés par les Serbes, ils ont été l’objet de négociations serrées pour être libérés.

On apprit incidemment qu’il s’agissait, en fait, d’espions français déguisés en humanitaires d’une ONG, constituée pour l’occasion, domiciliée à Lille. Sous le camouflage d’une opération humanitaire, on découvrit une opération d’espionnage qui avait mal tournée.

Certaines ONG sont d’authentiques organisations de propagande ou de déstabilisation chargées d’organiser des manifestations antigouvernementales, comme cela s’est vu et se voit en Ukraine, en Russie et ailleurs. Avec de gros moyens, souvent de provenance occulte.

Certaines se spécialisent dans la diabolisation de la Chine, de Cuba et autres "têtes de turc". Pour la défense des prisonniers politiques, des journalistes et de la liberté d’expression, nous dit-on, dans de luxueuses plaquettes publicitaires. Ce qui est bien.

Mais, étrangement, les mêmes ONG ignorent en permanence le sort des détenus politiques ou des journalistes, qui ne leur conviennent pas : en Palestine, par exemple, assassinés systématiquement, où les stations de radio sont détruites avec acharnement par l’armée d’occupation… 

La majorité de ces ONG ont pour fondement l’air du temps, les études marketing et la communication, le politiquement correct (ce que dicte la propagande), la normalisation sociale. Marchés très actifs, Bourses du commerce caritatif où des modes, des causes, tragiques ou misérabilistes, sont vendables, dans les états-majors de ces ONG, et d’autres pas… Sans parler de toutes celles qui font du prosélytisme religieux, financées notamment par les évangélistes américains.

Où commence, et où s’arrête la manipulation, dans le rôle effectif des ONG ?...

Au XIX° et début du XX° siècle, les zones de conflits ou de luttes d’influence entre grandes puissances étaient souvent prospectées par des missions "archéologiques", "explorations",  "découvertes", "études géographiques", ou autres appellations. Le plus souvent accompagnées d’agents secrets, quand elles n’étaient pas dirigées par eux.

Lawrence d’Arabie, se vantait d’avoir effectué ainsi tous les repérages, avant la première guerre mondiale, des lignes de chemin de fer, des emplacements et des mouvements de troupes ottomans et allemands, au Moyen Orient, sous ce travestissement. 

A présent, sous la dénomination d’ " humanitaires ", se dissimulent trop souvent des opérations de propagande et de soutien à des politiques d’intervention contestées et contestables. Mais, le problème c’est que tout le monde le sait. Les ONG ne sont plus prises au sérieux en termes de neutralité, d’éthique. Les "rebelles", d’où qu’ils soient, le savent… 

Alors, donner une mission à un ou une "volontaire" dans une zone de guerre, c’est jouer avec la vie de la personne en question. Ceux qui ont envoyé Elsa Serfass au casse-pipes, ou en "mission exploratoire" ce qui revient au même, doivent être, tout simplement et immédiatement, virés. Leur responsabilité civile doit être engagée au titre de la mise en danger d’autrui et non assistance à personne en danger.

Et, l’ONG en question doit être sévèrement sanctionnée par le versement d’un dédommagement maximum en faveur de la famille. Ce sont eux les responsables, en premier. La responsabilité des "rebelles", sans l’exonérer, ne vient qu’ensuite… 


Le prince et les oiseaux…

Oui, ONG et éthique…

Le président d’une prestigieuse ONG, connue pour ses interventions en faveur de la sauvegarde des espèces en voie de disparition, est le mari de la reine d’un pays situé au-delà du nord de la Seine. Ces reines qui portent des grands chapeaux enrubannés ou emplumés, suivant les saisons.

Ce prince arrivait par jet privé, pour visiter une Réserve dans un pays où je me trouvais, à ce moment là. L’ONG finançait, en effet, un programme pour la préservation d’une catégorie d’oiseaux migrateurs. 

En fait, l’ONG avait payé un billet aller-retour pour deux "étudiants - chercheurs" en ornithologie. Une indemnité journalière en monnaie locale suffisant, à peine, à leur subsistance. Sans salaire, ni couverture de retraite, ni assurance médicale. Ils étaient "volontaires". Normal, leur avait-on dit : travaillant pour une organisation "à but non lucratif".

Le jet était annoncé sur la piste de la ville proche de cette vallée. Le gouverneur de la région avait reçu instruction, s’agissant d’une visite privée, de recevoir cette personnalité avec discrétion. Toutefois, selon les traditions d'hospitalité du pays, un campement avait été dressé, avec un méchoui en prévision du déjeuner. La petite délégation, gardes-chasse et auxiliaires autour du gouverneur, attendait ce haut personnage.

Débarquant de l’avion avec une dame ("duchesse", paraît-il), le prince monta dans le véhicule tout terrain, sans un regard ni un mot pour ceux qui s’apprêtaient à le saluer, suivant les usages de courtoisie et de politesse internationalement reconnus.... Direction : la Réserve.

Après avoir observé, une demi heure, à la jumelle, ces gentils migrateurs dont la disparition présenterait, apparemment, un grave danger pour l’écosystème de la planète, le prince repartit aussitôt. Ses jumelles et la duchesse sous le bras. Refusant de déjeuner. Sans un mot et sans un regard. Le jet décolla et disparut.

Tout le monde comprit que ce personnage n’était qu’un mufle en goguette.

Ce que j’en ai retenu, avec mes amis sur place, au-delà de cette morgue épouvantable, c’est  l’hypocrisie de ces organisations prétendues "à but non lucratif" dont les dirigeants mènent grand train (3). Tout en exigeant de ceux qu’elles emploient de se serrer la ceinture et de prendre tous les risques.

Le jet, donne une idée du brouillard qui entoure le financement des ONG, leur origine, leur utilisation et la valeur de leur contrôle (4)… 

Tout le monde sait, mais on fait comme si…
 
 

 

 

 

 
 
(1)  Pays plus grand que la France : 623.000 km2. 4 millions d’habitants. Bois tropicaux, café, coton, tabac, canne à sucre. Surtout : diamants et uranium. Faune, flore, paysages extraordinaires.
(2)  Exemple, pour une ONG seulement. Rapport financier exercice 2005 de MSF : excédent : 9,8 millions €, produits financiers : 864 mille €…
(3)  Aucun député européen n’ose poser des questions sur le financement et le manque de transparence des ONG. S’inquiéter de l’utilisation des subventions européennes.
Exceptée une, car c’est une femme : Sivana Koch-Mehrin. Allemande, bardée de diplômes, elle a le courage dont les députés européens devraient s’inspirer. Elle est détestée par les ONG. Elle m’est donc très sympathique.
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1 juin 2007 5 01 /06 /juin /2007 21:11

J’ai retrouvé Johnny Clegg, à un de ses récents concerts. Il a entrepris une tournée européenne. Quelle joie !

J-Clegg-4----.jpg
 
Artiste complet, jouant de plusieurs instruments.  A la fois : auteur, compositeur, chanteur, musicien, danseur, à la personnalité exceptionnelle. L’homme ou l’artiste, on ne sait qui admirer le plus. Talent, courage, générosité… Rien à voir avec les "canards" s’enfuyant à tire d’ailes, en Suisse…

Il appartient à cette élite d’hommes que je qualifie du "XXII° siècle", car ils préfigurent l’aptitude humaine à vivre dans la diversité des ethnies, des religions, dans le respect, l’échange, le partage, et la solidarité.

Chanteur sud-africain. Il est né dans une famille juive (1), d’origine lituanienne et polonaise, près de Manchester, en Grande Bretagne. Il a un an, lorsque sa mère l’emmène en Israël. La famille n’y reste que peu de temps, avant d’émigrer en Rhodésie. Elle fait partie de ceux dont on ne parle jamais : les déçus du sionisme. Puis, c’est un va-et-vient entre Rhodésie, Zambie et Afrique du sud, avant une installation définitive.

Ballottements et souffrances de l’enfance, tempérés par la découverte des splendeurs de l’Afrique et de la musique. Découverte, aussi, du racisme, dans une de ses plus violentes expressions politiques : l’apartheid (2). En 1958, le chef de l’Etat, Hendrick Verwoer, invoquait encore la Bible pour justifier l’apartheid : « On doit enseigner aux noirs, dès leur plus jeune âge, que l’égalité avec les blancs n’existe pas ».

Exclus de la société, sans droit de vote, les noirs avaient un statut de quasi esclaves, taillables et corvéables à merci. Parqués dans des "hostels", des camps d’où ils ne pouvaient sortir sans autorisation. Semblables aux camps où sont actuellement, en 2007, parqués les Palestiniens, en Palestine. Sur leurs propres terres.

J-Clegg-2.jpgJohnny Clegg découvre la guitare à 15 ans et sa rencontre avec de grands musiciens zoulous, Mzila, Sipho, est déterminante. Ils l’initieront à la musique, la langue, la culture et la danse zoulou. Il deviendra lui-même un danseur zoulou reconnu. D’où son surnom de "Zoulou Blanc".


.
Il ira jouer dans les "hostels", sera arrêté à plusieurs reprises par la police. Il était interdit à un "blanc" de fréquenter les "noirs" et aura souvent, pour sa sécurité, à se réfugier dans les réserves zouloues. Il sera de tous les combats contre l’apartheid. Se sentant frère du peuple zoulou et membre de cette nouvelle nation, l’Afrique du sud, qu’il souhaitait sans le racisme.



johnny-clegg.jpg
Avec ses amis africains, il fondera des groupes musicaux (3), fusionnant musique rock, celte, zouloue, textes en anglais, en afrikaner et en zoulou. Ce sont d’énormes succès mondiaux, souvent censurés en Afrique du sud, car trop engagés contre le racisme et son système politique : l’apartheid. Nombreux seront les "blancs" sud-africains à lutter contre l’apartheid. Le procès, où Mandela sera condamné pour "sabotage", comprenait 155 personnes dont 22 "blancs".

Allez le voir à ses concerts, achetez ses disques, notamment son dernier album, sorti fin 2006 : One Life. Vous voyagerez dans la musique rock, celte et zouloue, magnifiée par un artiste qui met à l’honneur La Dignité Humaine.

Impossible de refaire l’Histoire. Mais, rêvons…

Si dans la communauté "française" d’Algérie, il y avait eu des hommes qui comme Johnny Clegg, avaient aimé et appris ce pays, son histoire, sa culture, connu et respecté sa religion, que serait-il advenu ?  Imaginons des hommes parlant arabe et berbère, connaissant à fond la musique arabe, berbère, leurs chants, leurs danses, fusionnant musique occidentale, orientale et nord-africaine. Bien avant le raï…

Qui se seraient reconnus, avant tout, "algériens" et auraient lutté, dans la solidarité et la fraternité, contre l’apartheid et le racisme instaurés par la Loi Crémieux accordant la nationalité française à quelques uns, et non pas à la totalité des habitants du pays. Excluant ainsi une majorité au profit d’une minorité privilégiée. Créant ainsi des millions de zombies, des "non êtres"… Si des hommes avaient privilégié la solidarité, au lieu du racisme : que serait-il advenu ?

Des hommes, issus de France ou d’ailleurs, luttant pour l’indépendance de l’Algérie vis-à-vis de la métropole comme l’ont fait les anglais d’Amérique vis-à-vis du Royaume Uni, ou les portugais du Brésil vis-à-vis du Portugal, ou les espagnols des autres pays d’Amérique du Sud vis-à-vis de l’Espagne… Que serait-il advenu ?

Actuellement, ils seraient "algériens" en Algérie, aussi intégrés que l’est Johnny Clegg, dans son pays d’adoption : l’Afrique du sud. Et, fiers de l’être !...

Malheureusement, il n’y a pas eu d’hommes, d’artistes de la trempe de Johnny Clegg.

Mais, il reste : Enrico Macias
 
 
 
 








(1) Né le 7 juin 1953, à Bacup près de Manchester (UK).
(2) Politique instaurée en 1948 par le parti au pouvoir, sous la direction du Dr. Daniel Malan.
(3) Juluka, puis Savuka. Plusieurs millions d’exemplaires vendus. Nombreux disques d’or et de platine. Billboard Music Award pour Heat, Dust and Dreams, classé : meilleur album du monde, en 1993.




 
 
 
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25 mai 2007 5 25 /05 /mai /2007 11:53

 

 

A Costa dos Murmurios

 

J’aime beaucoup la musicalité du portugais. Tour à tour force et douceur, empreintes de gravité, jusque dans les chuchotements. Le Rivage des Murmures est la traduction du beau titre de ce roman, écrit par une femme : Lidia Jorge. De toute son œuvre romanesque, mon préféré.


Lidia-Jorge.jpg

Romancière de renommée internationale, devenue une institution du monde littéraire lusitanien, elle a vécu les moments les plus denses du Portugal actuel. L’effondrement de la dictature, la décolonisation et la fin de son empire.

 

Jeune mariée, elle a séjourné en Angola et au Mozambique dans les années 1970. Epouse d’un jeune portugais se retrouvant, malgré lui, officier dans une des guerres coloniales les plus longues et les plus dures que l’Afrique ait connu.

 

Continent, qui en a tant connu…

C’est la trame de ce roman (1). La narratrice est l’épouse d’un jeune chercheur en mathématiques, « appelé » sous les drapeaux, comme on disait. " Pour défendre son pays ". En fait, les colonies que son pays possédait depuis cinq siècles. A des milliers de kilomètres.

 

L'argument étant un peu léger, la propagande les conditionnait expliquant que c’était défendre la « civilisation occidentale ». L’enjeu devenait plus sérieux, sans être pour autant crédible… Hymne éternel du mythe de la race supérieure, justifiant toutes les spoliations et les horreurs.

Nous sommes au Mozambique, en 1970. Au plus fort de la guerre. Le général Kautza de Arriaga avait déclenché une opération de grande envergure avec 35.000 hommes et une centaine d’avions et d’hélicoptères près de la frontière tanzanienne. L’objectif étant de récupérer la ville et la région de Muda, que la résistance avait libérées.

Ce genre d’opérations folles, la « der des der », rêvées par des états-majors incapables de comprendre les mécanismes inexorables d’une guerre menée par une Nation pour sa Libération. Plus d’hommes, plus de matériel et plus d’argent, disent-ils, et nous éradiquerons ces indépendantistes, ces terroristes, ces insurgés, qui mettent en danger la « civilisation occidentale » …

 

Et, bien sûr, ils la perdent.

Les militaires portugais n’avaient pas retenu la leçon des récentes guerres d’indépendance des colonies françaises d’Indochine quinze ans plus tôt, ou d’Algérie huit ans plus tôt. Ils se croyaient plus forts.

 

Forts du soutien des sud-africains et rhodésiens (2) blancs qui s’arc-boutaient sur l’apartheid, finançant leurs délires guerriers avec les richesses de l’Afrique du sud qu’ils gardaient pour eux. Apartheid, justifié pour défendre la « civilisation occidentale », aussi…

Par petites touches, la narratrice nous immerge dans la société coloniale représentée par les habitants d’un hôtel regroupant les familles des militaires. Dans le style, en plus artisanal, du « Compound » US à Bagdad.

 

Puis, à travers son regard, la découverte du paysage habituel des colonies, quelle qu’en soit la nationalité de la métropole : racisme, mépris viscéral à l’égard des populations autochtones, implacablement maintenues dans le sous-développement… Pour eux pas de nationalité portugaise. Juste des esclaves, des zombies, des non êtres…

 

Schéma classique.

Aucun manichéisme toutefois, on ne voit rien des combats, on n’entend rien. Vase clos de ces familles, où la fureur des luttes passe inaperçue. A peine ressentie ou entrevue, si ce n’est lors du départ des hommes en « opération de pacification », pour ne revenir que quelques semaines plus tard. A peine si on sait que nous nous trouvons au Mozambique. La violence du témoignage en est encore plus forte.


Cinq siècles de colonisation d’un pays d’une extraordinaire richesse : fleuves et rivières, mines (3). Richesses qui continueront à être volées, même après son indépendance politique, lors d'un quart de siècle de guerre civile, imposée et financée par les pays occidentaux. Comme pour l’Angola.

Une fois et demie la France, avec 2.500 km de côtes parmi les plus poissonneuses et les plus belles du monde. Un pays vidé de sa population par le transfert d’esclaves mozambicains au Brésil. Des centaines de milliers, par siècle (4). Actuellement, à peine vingt millions d’habitants.

 

Mozambique, laissé exsangue, avec une espérance de vie de 47 ans…

 

Moz-1.jpg

 

Et puis, la découverte des atrocités : tueries, tortures, massacres. Des photos ramenées du front, découvertes, un peu par hasard avec la complicité angoissée d’autres épouses de militaires. La barbarie. La folie.

 

Insensiblement, la jeune mariée découvre un autre personnage. Son mari, d’innocent mathématicien, idéaliste, perdu dans ses équations, devenu un tueur, un tortionnaire, une machine à massacrer.

 

Dans l’ambiguïté de la fin du roman, sur la disparition mystérieuse du mari, on comprend que l’épouse reprend sa liberté. Comme le Mozambique prendra la sienne, en 1975.

Tragique, poignante métaphore, sur la folie raciste et coloniale de l’Occident. Imbus d’une puissance qui ne correspond plus à l’état du monde actuel, des pays massacrent et pillent dans l’impunité. Ils se refusent à l’admettre, mais ils ne peuvent plus régenter le monde par la force.

Encore plus dur à supporter est le douloureux et angoissant portrait de l’homme, broyé dans un engrenage, conditionné, manipulé, perdant progressivement tous ses repères au point de devenir ce tortionnaire, tueur fou.

 

Ce « serial killer » que le cinéma, les jeux et autres médias imposent à nos imaginaires comme le héros de nos faces cachées…

Conditionnant notre inconscient collectif pour banaliser les crimes contre l’humanité que nous perpétrons, ou dont nous nous rendons complices, au XXI° siècle…

 

Roman magnifique, sans équivalent dans la littérature française.


 

 
 
 
(1) La plupart de ses romans ont été traduits en français, avec plus ou moins de bonheur, notamment : La Journée des Prodiges, La Dernière Femme, Un Jardin sans Limites, La Couverture du Soldat, La Forêt dans le Fleuve, Le Vent qui souffle dans les Grues.
(2) La Rhodésie, après des atrocités coloniales innommables, allait devenir plus tard indépendante, en 1980, et prendre officiellement le nom de Zimbabwe en 1982. Bob Marley a célébré cette indépendance dans une de ses plus célèbres chansons.
(3) Gisements d’uranium, amiante de fer, bauxite, gaz, diamants. Actuellement des mines de charbon sont exploitées dans la région sud de Maputo et au centre du pays, à Tete.
(4) Un des grands centres de prise et d’expédition d’esclaves vers le Brésil, mais aussi vers Madagascar et la Réunion. Sous des formes officieuses ou officielles, jusqu’en 1887 à Madagascar, alors colonie française.



 
 
 
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